
Via un tweet, la Préfecture de police de Paris avait affirmé très vite, trop vite ? quelques heures après son interpellation que Samia avait tenu des propos faisant l’apologie du terrorisme.
Au final, la jeune femme est poursuivie pour « outrage, rébellion et menace envers une personne dépositaire de l’autorité publique », et non pour apologie du terrorisme.
Un cafouillage qui intervient dans un contexte particulier où beaucoup de musulmans se sentent pointés du doigt.
Nous avons rencontré Samia ce lundi après-midi au domicile de sa sœur où elle a passé la nuit, « trop fragile pour être seule ». Encore très bouleversée et souvent en pleurs, elle a accepté exceptionnellement de nous donner sa version des faits.
Comment-vous sentez-vous ?
Je suis très fatiguée. La garde à vue a été très longue. 48 heures de stress, de tension extrême. Je n’ai pas beaucoup dormi. Je me réveillais sans cesse en pensant à ma chienne qui n’est plus. Elle a été abattue pour rien. Je vais mettre du temps à m’en remettre. Je pleure sans cesse sa disparition. C’était un bébé, elle n’avait que six mois.
Pourquoi avez-vous été contrôlée ?
C’était le soir des vacances et la route était bouchée. Avant d’aller chez ma sœur, dîner, j’étais en route chez une de mes amies qui vit sur les quais de la Seine à l’Ile-Saint-Denis. Je n’aurais pas dû mais pour gagner du temps, j’ai doublé en empruntant la voie du tramway. C’est interdit et j’ai été contrôlée pour cette raison. Une voiture de police m’a mise alors sur le côté. L’un des policiers m’a demandé mon permis et les papiers du véhicule. Je n’avais que mon permis sur moi. La carte grise et le certificat d’assurance étaient à la maison, mais je suis en règle. Ils ont bien vu qu’il y avait sur le pare-brise la vignette d’assurance.
Vous avez très vite senti de la tension….
Oui. Ils ont commencé à me narguer. Ils ont répété en souriant : « Tu vas avoir des tas d’amendes ». Excédée, je les ai nargués à mon tour en répondant : « ça m’est égal, je les ferai sauter les amendes ». C’est là que le policier qui a abattu ma chienne, a dit « Il doit bien te sauter toi aussi ! ». Enervée, j’ai répondu au tac au tac : « Il sautera ta sœur aussi peut-être ! ». C’est ma dernière phrase qui les as énervés. Alors qu’ils allaient vérifier mon permis dans la voiture, ils sont revenus vers moi et m’ont dit « Ceci est un outrage ». Puis, ils m’ont demandé de sortir du véhicule.
Que s’est-ils passé ensuite ? (...)
Je n’ai jamais tenu des propos faisant l’apologie du terrorisme. Comme l’un des policiers ne cessait de pointer son arme sur elle, je lui ai juste demandé pourquoi il agissait ainsi ? Il m’a répondu « Je le bute (NDLR : la chienne) et je te bute toi sans scrupules ». Je lui ai dit « si tu peux faire un truc comme ça, cela veut dire que tu es un mécréant ». Il a dit : « Comment tu sais qu’on est des mécréants ? ». J’ai répondu : « si t’es capable de commettre un tel acte c’est que tu crois en rien ». Je ne vois pas en quoi ces propos font l’apologie du terrorisme. Je suis croyante et pour moi, si tu es prêt à tuer une chienne et un être humain sans scrupules, c’est que tu n’as pas peur ni de la loi ni de Dieu, d’où l’utilisation du terme « mécréant ».
Où étiez-vous quand le policier a abattu votre chienne ?
J’étais dehors. Ils ont fini par me faire sortir de la voiture. La porte était restée ouverte. C’est à ce moment que ma chienne est sortie toute seule. Je criais « Lâchez-moi », « Lâchez-moi ». Ils étaient 3 à essayer de me faire rentrer dans la voiture de police. Je voulais récupérer mon sac que j’avais laissé dans ma voiture, il y avait tous mes papiers et de l’argent. Ils ont refusé. Le quatrième policier se tenait à proximité de ma chienne. Elle aboyait c’est vrai mais n’a jamais menacé qui que ce soit. D’ailleurs, plusieurs témoins confirment mes propos. C’est là que le policier a tiré. (...)
Que comptez-vous faire ?
On va porter plainte. Ma chienne a été abattue gratuitement. Et j’ai été accusée par la préfecture de police de Paris d’avoir tenu des propos. Comme ils savent qu’ils ont commis une erreur, comme ils ont tué mon chien gratuitement, il fallait qu’ils me fassent passer pour une terroriste.