
La dissolution des Soulèvements de la Terre sera-t-elle effective, comme l’a annoncé le ministre de l’Intérieur ? Quels sont les recours possibles pour ce collectif opposé entre autres aux mégabassines ?
L’annonce est tombée comme de l’huile sur le feu. Mardi 28 mars, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a déclaré engager la dissolution des Soulèvements de la Terre, l’un des organisateurs des mobilisations contre les mégabassines. La procédure intervient trois jours après la manifestation à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), marquée par de violents affrontements entre les forces de police et les opposants aux retenues d’eau agricoles. L’annonce de la dissolution a été immédiatement dénoncée par de nombreuses personnalités politiques et associatives de gauche et écologistes. (...)
Concrètement, que va-t-il se passer ? « La procédure de dissolution est initiée par l’envoi par le ministre de l’Intérieur d’une lettre de griefs à l’association ou au groupement qu’il entend dissoudre », explique à Reporterre Me Aïnoha Pascual, avocate au barreau de Paris. Le destinataire a dix jours pour répondre. À l’issue de ce contradictoire, un décret de dissolution peut être adopté en conseil des ministres.
Sauf que Les Soulèvements de la Terre ne sont pas une association, mais un collectif. Dans un communiqué, celui-ci déclare : « Quant à la prétention à “faire disparaître Les Soulèvements de la Terre”, nous sommes bien curieux·ses de voir ce que représenterait la “dissolution” d’une coalition qui regroupe des dizaines de collectifs locaux, fermes, sections syndicales, ONGs à travers le pays. Contrairement aux fables qui seront délivrées par le renseignement intérieur pour désigner de quelconques figures dirigeantes à clouer au pilori, Les Soulèvements de la Terre n’ont rien d’un groupe circonscrit et représentent après deux ans d’existence un large réseau implanté à travers diverses régions. » (...)
Des précédents
Auparavant, cette procédure créée dans les années 1930 était réservée à la lutte contre les milices et groupes armés. Elle a d’abord été utilisée contre les ligues fascistes puis, dans les années 1970, à l’encontre de groupes d’extrême gauche, notamment maoïstes. La loi confortant le respect des principes de la République du 24 août 2021, dite loi Séparatisme, étend son champ d’application en la rendant possible contre toute association ou groupement de fait « qui provoque à des manifestations armées ou à des agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ». « C’est sur ce fondement-là que le gouvernement entend manifestement dissoudre Les Soulèvements de la Terre », estime Me Aïnoha Pascual.
Son efficacité est radicale. « La dissolution empêche l’association d’exister en tant qu’entité légale, de pouvoir toucher des financements et de demander des salles pour se réunir. Et elle a pour conséquence encore plus directe d’empêcher le regroupement de personnes qui étaient autrefois associées et affiliées à ce groupement, sous peine de poursuites », explique Julien Talpin, sociologue au CNRS et membre de l’Observatoire des libertés associatives. (...)
Ces dernières années, plusieurs collectifs étiquetés « ultragauche » par le gouvernement ont été dissous ou menacés de l’être. (...)
Des recours possibles
Pourquoi cette dissolution, pourquoi maintenant ? Pour Julien Talpin, il s’agit avant tout pour le gouvernement d’allumer un contre-feu après le carnage de Saint-Soline — 200 blessés du côté des manifestants, dont 40 grièvement et 2 toujours suspendus entre la vie et la mort. (...)
Des articles attestent que les forces de l’ordre auraient bloqué l’arrivée des secours. Il n’est pas impossible que la responsabilité de l’État soit engagée », commente le chercheur. Dans ce contexte, la dissolution des Soulèvements de la Terre constituerait une « riposte juridique et politique » du gouvernement (...)
Plus généralement, cette dissolution prouve qu’une marche supplémentaire a été franchie dans la criminalisation des luttes écologistes (...)
Quels recours reste-t-il aux Soulèvements de la Terre pour éviter de disparaître ? D’abord, répondre point par point à la lettre de griefs. Puis, si le gouvernement ne renonce pas et adopte le décret de dissolution, saisir le Conseil d’État « par la voie d’un référé liberté et/ou d’un recours au fond », précise Me Aïnoha Pascual. Une démarche qui a toutefois peu de chances d’aboutir. (...)
Reste la pression de la rue : Les Soulèvements de la Terre, ainsi que Bassines non merci et la Confédération paysanne, ont appelé à des rassemblements devant toutes les préfectures du pays, jeudi 30 mars à 19 heures, « pour la fin des violences policières ». Il y a fort à parier que la question de la répression administrative des mouvements écolos sera également au rendez-vous.
BassinesNonMerci @BassinesNon chez social.tmprs.net
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