
Ses propos lui ont valu le titre d’"adhérent d’honneur" du groupuscule d’extrême droite Génération identitaire. Vendredi 5 avril, lors de la conférence de presse finale du sommet du G7 des ministres de l’Intérieur à Paris, Christophe Castaner a lancé de graves accusations à l’encontre des ONG qui secourent les migrants en détresse lors de leur traversée de la Méditerranée.
"On a observé, de façon tout à fait documentée, je vous le dis, une réelle collusion à certains moments entre les trafiquants de migrants et certaines ONG", a dénoncé le ministre. Et il a ajouté : "On a observé que certains navires d’ONG étaient ainsi en contact téléphonique direct avec des passeurs qui facilitaient le départ des migrants depuis les côtes libyennes." Selon lui, "les ONG dans ce cas-là ont pu se faire complices des passeurs".
Sur quels "documents" Christophe Castaner se base-t-il ? Contacté par franceinfo, le ministère de l’Intérieur a répondu qu’"il s’agit de deux rapports de Frontex [agence européenne de contrôle des frontières] datant de novembre et décembre 2016 qui ont été distribués aux Etats membres". Dans une vidéo mise en ligne mardi, Christophe Castaner cite lui aussi ces deux rapports de Frontex, mais n’évoque plus que "des interactions de fait entre des passeurs et certaines ONG".
Ses propos lui ont valu le titre d’"adhérent d’honneur" du groupuscule d’extrême droite Génération identitaire. Vendredi 5 avril, lors de la conférence de presse finale du sommet du G7 des ministres de l’Intérieur à Paris, Christophe Castaner a lancé de graves accusations à l’encontre des ONG qui secourent les migrants en détresse lors de leur traversée de la Méditerranée.
"On a observé, de façon tout à fait documentée, je vous le dis, une réelle collusion à certains moments entre les trafiquants de migrants et certaines ONG", a dénoncé le ministre. Et il a ajouté : "On a observé que certains navires d’ONG étaient ainsi en contact téléphonique direct avec des passeurs qui facilitaient le départ des migrants depuis les côtes libyennes." Selon lui, "les ONG dans ce cas-là ont pu se faire complices des passeurs".
Sur quels "documents" Christophe Castaner se base-t-il ? Contacté par franceinfo, le ministère de l’Intérieur a répondu qu’"il s’agit de deux rapports de Frontex [agence européenne de contrôle des frontières] datant de novembre et décembre 2016 qui ont été distribués aux Etats membres". Dans une vidéo mise en ligne mardi, Christophe Castaner cite lui aussi ces deux rapports de Frontex, mais n’évoque plus que "des interactions de fait entre des passeurs et certaines ONG".
Interrogé par franceinfo, Frontex affirme que le ministre de l’Intérieur fait référence non pas à deux, mais à "un rapport confidentiel qui a fuité". Le Financial Times (article payant) le citait en décembre 2016, assurant que l’agence y évoquait "une collusion" entre les ONG et les réseaux de passeurs. Frontex avait démenti – et maintient ses dénégations aujourd’hui. Le FT avait d’ailleurs publié un correctif, reconnaissant son erreur et corrigé son article.
Nous avons examiné chacun des rapports publics diffusés par Frontex en 2016. Deux d’entre eux mentionnent d’une phrase des appels, passés "principalement" depuis des bateaux de migrants, à l’aide de téléphones satellitaires, et ayant permis de détecter "presque exclusivement" toutes les embarcations en détresse en Méditerranée et de lancer les opérations de sauvetage. Sans plus de précisions.
Il est aussi question d’appels téléphoniques dans un rapport annuel (PDF) de Frontex de 2017. Mais ils ont été passés par des migrants – sur instruction des passeurs – au Centre de coordination de sauvetage maritime (MRCC) de Rome, où les garde-côtes italiens coordonnent les opérations de secours en mer. Et non pas par des passeurs à des ONG, comme l’affirme Christophe Castaner. (...)
Une allusion au système Alarm Phone ?
En Méditerranée, il existe également un numéro pour les migrants en détresse : l’Alarm Phone, lancé par l’ONG Watch The Med. Mais les bénévoles qui répondent ont pour mission de porter conseil, de récupérer les coordonnées GPS des embarcations et de contacter les autorités. L’ONG précise qu’elle n’intervient pas directement puisqu’elle ne dispose pas de bateaux susceptibles de faire du secours en mer.
Joint par franceinfo, Hatem Gheribi, membre du réseau Alarm Phone, dénonce les "accusations" du ministre de l’Intérieur, "fondées sur rien du tout". Il souligne que ces "calomnies" et ces "mensonges" sont proférés alors que plus aucun navire d’ONG n’est présent au large de la Libye depuis début février, comme l’indiquait l’AFP. Les très critiqués garde-côtes libyens y opèrent ainsi seuls le secours en mer. (...)
Toutes les parties impliquées dans les opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale aident involontairement les criminels à atteindre leurs objectifs à moindre coût, renforçant leur modèle économique en augmentant leurs chances de succès.Frontexdans son rapport annuel de 2017
Les accusations de Christophe Castaner font surtout écho à celles d’un magistrat italien, datant elles aussi de 2017. Des attaques reprises en boucle en Italie par le Mouvement 5 étoiles et la Ligue du Nord. Carmelo Zuccaro, procureur de Catane, en Sicile. (...)
Face à ces suspicions, le gouvernement italien a instauré en juillet 2017 un code de bonne conduite qui impose aux ONG une grande transparence et surtout des opérations entièrement régies par les gardes-côtes italiens. Il les oblige ainsi à accepter un policier à bord et leur interdit, sauf consigne contraire des gardes-côtes, de transférer sur un autre navire les migrants qu’ils auront secourus. Ce code a reçu l’aval de la Commission européenne, mais il a été très critiqué par les ONG.
SOS Méditerranée a ainsi jugé qu’il ne pouvait "se substituer au droit maritime international" et qu’il participait "à la campagne de dénigrement des ONG". L’ONG a fini par accepter de le parapher, après l’introduction de trois amendements, expliquait son président au Monde : "Pas d’opération de police à bord pendant les vingt-quatre premières heures ; pas d’armes à bord, sauf dans certains cas ; et le fait de permettre les transbordements."