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Dans le centre de Pournara, à Chypre, les demandeurs d’asile vivent "comme des lions en cage"
Article mis en ligne le 25 avril 2022

Il est le "cauchemar" de tous les demandeurs d’asile de Chypre. Créé fin 2019, le centre d’enregistrement de Pournara, le seul de l’île, accueille aujourd’hui plus de 3 000 personnes, pour une capacité de 1 000 places. Dans la structure complètement dépassée, les exilés manquent de tout : de nourriture, d’eau, d’hygiène...

Devant une haute porte en fer surmontée d’un grillage, une vingtaine de personnes patientent, les yeux rivés sur l’autre côté. Il est 15h et la distribution de nourriture tarde. "Cela fait deux heures qu’on attend", soupire John, ancien employé dans une mine d’or au Libéria. Une voiture s’avance soudain au loin, à l’intérieur. Le groupe, qui grossit à mesure que les minutes passent, forme immédiatement une file d’attente compacte. Pour accéder plus vite au déjeuner, les exilés se poussent, des voix éclatent lorsque l’un d’entre eux cherche à passer devant les autres. Après un quart d’heure d’attente, la distribution commence et les sourires s’affichent sur les visages. Dont celui de John. "C’est un bon jour aujourd’hui pour les Africains : c’est du poulet !".

Ce rituel est devenu son quotidien. Depuis déjà plusieurs semaines, John vit dans le camp de Pournara, l’unique centre d’enregistrement des demandes d’asile à Chypre. Planté au milieu des champs à une dizaine de kilomètres de la capitale Nicosie, les exilés, en provenance du nord de l’île sous occupation turque, doivent s’y rendre une fois la Ligne verte franchie. (...)

À l’intérieur, leur dossier est constitué, et les demandeurs d’asile sont soumis à divers examens médicaux. Mais la procédure, censée durer une quinzaine de jours maximum, prend, actuellement, plusieurs mois. En cause ? Le nombre toujours plus croissant d’arrivées.

(...) C’est comme une prison. Les gens deviennent fous, ils sont comme des lions en cage". (...)

Des violences et des agressions éclatent régulièrement entre les occupants du camp, excédés. Début décembre, sept personnes ont été blessées dans des affrontements ayant impliqué quelque 300 migrants. En janvier 2021, une rixe entre des ressortissants syriens et africains avaient fait 25 blessés, admis à l’hôpital. L’affrontement avait duré près de sept heures.

"Trouver de l’eau, c’est notre obsession"

Un rapport du Commissaire aux droits de l’enfant publié en début d’année, qui dénonce les conditions de vie dans le camp pour les mineurs, a poussé le gouvernement à se rendre sur place, le 14 mars. Outre des transferts de plusieurs jeunes migrants dans des hôtels de l’île, le président Níkos Anastasiádis a promis, "à l’avenir", des conditions "plus humaines" pour tous les demandeurs d’asile. Notamment grâce à une réfection et à une expansion du centre, et à l’établissement de zones dédiées aux mineurs et aux personnes les plus vulnérables. Ces projets, d’un coût total de 20 millions d’euros, sont garantis par le mémorandum signé le 21 février entre Nicosie et l’Union européenne. (...)

Pour les exilés actuellement dans le camp, aucun changement à court terme n’est prévu. Les déchets s’amoncellent maintenant au-delà de l’enceinte, à côté du linge étendu sur les barbelés. Et depuis deux semaines, les employés de Pournara ne distribuent plus d’eau (...)