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Libération
DÉCHETS NUCLÉAIRES : A Bure, gendarmes et opposants entrent dans le dur
Article mis en ligne le 3 mars 2018

Après l’évacuation musclée du bois Lejuc, les adversaires du projet d’enfouissement créent un îlot de résistance dans la Meuse et appellent à un rassemblement ce week-end.

(...) Prévu de longue date, ce rassemblement prendra un relief particulier après l’intervention, le 22 février, de 500 gendarmes venus déloger au petit matin une vingtaine d’occupants qui dormaient dans leurs cabanes. Ensuite, les pelleteuses ont fait table rase de ces constructions en bois et de quelques barricades érigées sur une partie de ce vaste site de 221 hectares choisi par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) afin de mener son projet d’enfouissement des résidus radioactifs de nos centrales.

C’est contre ce cimetière du nucléaire (lire ci-contre) que les associations et les occupants entendent mobiliser de nouveau. Ils promettent des tables rondes de débats, la construction d’une « vigie » à l’orée du bois pour surveiller les activités de l’Andra, un « joyeux chaos » et « beaucoup d’improvisation ».

« Pornographie policière »

Le 22 février, après l’évacuation de la forêt, les gendarmes avaient rendu visite à la « maison de résistance au projet de poubelle nucléaire », toute proche du bois Lejuc. Le lendemain, encore sous le choc, Colin (1) racontait la scène : « Ils ont défoncé la porte de la grange, c’était un peu l’angoisse. Ensuite, on s’est rassemblés dans une pièce à l’étage en s’accrochant les uns aux autres pour résister. » (...)

Sept militants avaient été placés en garde à vue et deux sont depuis incarcérés en attente de leur jugement, prévu dans deux semaines. « C’était de la pornographie policière : ils sont simplement venus faire une opération de communication politique », estime Sylvain. Dans la nuit après l’expulsion, plusieurs militants sont retournés dans le bois Lejuc. S’en est suivi un jeu du chat et de la souris pendant plusieurs jours entre les opposants et les forces de l’ordre. Sur une plateforme perchée à plus de vingt mètres du sol, un « hibou » - comme se font appeler ces militants - explique : « C’est une façon de leur faire comprendre qu’on était toujours là pour occuper. » (...)

Le gouvernement avait prévu son coup en deux temps. Après l’expulsion des « occupants illégaux », le secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique, Sébastien Lecornu, devait rencontrer « l’opposition légale ». Autrement dit, les associations historiques de lutte contre le projet Cigéo. Une stratégie qui a échoué : les responsables associatifs ont décliné son invitation et se sont rassemblés le soir du 22 février devant la préfecture de la Meuse, à Bar-le-Duc, pour protester contre l’expulsion du bois Lejuc.

Opposé au projet depuis plus de vingt ans, Claude Kaiser, ancien maire d’un village situé à quelques kilomètres du futur site d’enfouissement, assure que l’intervention des gendarmes a « renforcé les liens entre générations en lutte ». « On est solidaires et on est venus le dire », poursuit-il. Un constat partagé par l’agriculteur Jean-Pierre Simon : « Ils ont fait le choix de la militarisation des discussions. » (...)

Les opposants ont également construit leur lutte en dehors du bois. A Bure, la « maison de résistance » appartient aux associations Bure Zone libre et Réseau Sortir du nucléaire. Et depuis quelques mois, c’est dans le village voisin de Mandres-en-Barrois que d’autres militants se sont installés. « On a acheté trois maisons à Mandres », explique Sylvain, à l’intérieur de l’une d’elles. Au même moment, un camion de gendarmerie est stationné devant sa porte. Comme les autres militants, il décrit une pression policière permanente (...)

En prévision de ce week-end de mobilisation, les militants s’organisent pour accueillir les soutiens qui affluent depuis quelques jours. « Des chaînes de messages ont vite tourné et certains ont sauté dans leur voiture pour nous rejoindre », explique Colin. (...)