
Suite à la relaxe de 54 faucheurs volontaires ayant détruit une vigne OGM, plusieurs organismes de recherche ont critiqué le verdict et dénoncé une remise en cause du « droit à expérimenter ». Une position que ne partage pas le généticien moléculaire Christian Vélot. Énonçant les risques environnementaux générés par ce test en plein air, il interroge : « Pourquoi fabriquer cette vigne génétiquement modifiée plutôt que d’étudier des vignes déjà résistantes à des maladies virales ? ». Il plaide pour des recherches participatives : « Ce sont les paysans qui sont les premiers généticiens du monde. »
(...) Les premiers généticiens du monde : les paysans
Faut-il qu’une solution à un problème agronomique sorte d’un labo pour qu’elle mérite d’être qualifiée de progrès ? N’oublions pas que ce ne sont pas les chercheurs, ni même les agronomes, qui ont inventé l’agriculture, mais les paysans qui sont d’ailleurs les premiers généticiens du monde. D’ailleurs les prétendues « solutions » sorties des labos n’en sont pas car elles s’inscrivent dans le tout ou rien. En éradiquant ou en neutralisant l’action (des insectes, des champignons, des bactéries, des virus...), on ne fait que déplacer le problème en perturbant des équilibres dans des niches écologiques ou contextes agronomiques donnés. On alimente ainsi la démarche de fuite en avant dans laquelle s’inscrivent l’agriculture et la technoscience depuis des décennies.
En neutralisant cet essai de vigne GM le 15 août 2010, les faucheurs volontaires ont commis un acte salutaire. Non seulement parce qu’ils ont mis fin à une prise de risques environnementaux considérables et inutiles, mais également parce qu’ils ont soulevé la question centrale du choix stratégique des orientations de recherche publique. Ce sont eux, par leurs actions, qui œuvrent pour des expérimentations contrôlées, pour le droit d’ expérimenter pour améliorer notre avenir collectif, pour une mission des chercheurs au service de l’intérêt général, et pour une expertise publique indépendante. Mesdames et Messieurs les responsables des grands organismes, n’inversez pas les rôles, et remettez les choses à l’endroit comme l’a fait la Cour d’Appel de Colmar le 14 mai dernier.