
Cela fait bientôt un mois que la population d’Aysén en Patagonie est dans la rue et se rebelle, sous la bannière « Aysén, ton problème, c’est mon problème ».
Le but : faire entendre une colère généralisée et demander au gouvernement d’appliquer une politique de prix adaptée à cette région isolée et extrême d’un point de vue géographique et climatique, une région stratégique puisqu’elle a été peuplée pour créer la frontière avec l’Argentine.
Il est temps, disent les habitants d’Aysén, « que nous ayons accès à une vie plus digne, et que nous cessions de survivre alors qu’Aysén a affiché, en 2011, le taux de croissance le plus élevé de tout le Chili ».
(...) Isolée du reste du monde et du reste du Chili (il est impossible de traverser la Patagonie par la route, il faut continuellement prendre le bateau ou passer par l’Argentine), Aysén prouve que « l’esprit rebelle » qui caractérisait les Patagons du siècle dernier est loin d’être mort.
Ce sont les pêcheurs artisanaux qui ont, les premiers, exprimé leur ras-le-bol en février, en manifestant contre la loi sur la pèche en discussion au Congrès, qui met en place des quotas favorisant la pêche industrielle au mépris de la pêche artisanale.
Ils se sont installés sur le pont de Puerto Aysén et ont monté des barricades empêchant l’arrivée de l’essence dans les stations et immobilisant toute la vie économique de la région. Ce blocus devait vite être réprimé par des forces spéciales de carabiniers, venus d’une autre région et faisant preuve d’une grande violence. (...)
Très vite, les pêcheurs ont été rejoints par tous les citoyens : des étudiants, des camionneurs, des chauffeurs de bus, des commerçants, des écologistes, des autorités locales, des hommes d’Eglise et même des retraités.
Sur la place centrale de la ville où ils se réunissent « on voit même des femmes avec leur landau, des enfants » raconte un habitant de Coyhaique. Les routes ont été bloquées, les aliments se sont faits rares, les distributeurs de billets se sont vidés… Peu à peu, tous les manifestants se sont réunis dans ce qu’ils ont appelé le « mouvement social pour la région d’Aysén », une manière de faire passer leurs divers messages jusqu’à la présidence, à Santiago. (...)
Depuis le mercredi 14 mars, alors qu’à Coyhaique, les autorités gouvernementales proposaient des négociations, les forces spéciales de carabiniers ont redoublé leurs coups à Puerto Aysén, à quelques 60 km de là.
Même Antonio Horvath, aujourd’hui sénateur d’Aysén et membre du parti de Sebastián Piñera, le RN (renovación nacional) la dénonce...
La violence déployée à l’encontre des manifestants, des artisans pêcheurs et les familles de dirigeants du Mouvement social pour la région d’Aysén, affole les habitants d’Aysén. (...)
Magdalena Rosas, professeur de musique à Coyhaique et membre d’un réseau d’observateurs de droits de l’homme appuyé par l’Eglise a décidé de monter un blog et témoigner des événements au quotidien.
Cette femme qui « aime sa terre patagone où elle a vu naître ses enfants » veut ainsi combattre la violence et éviter qu’il n’y ait de victimes dans ce conflit social. Elle questionne la bonne foi des décideurs :
« Est-ce ainsi que le gouvernement montre sa volonté de nous écouter et son engagement vis-à-vis des habitants de notre région, est-ce ainsi qu’il veut discuter des onze changements concrets que nous revendiquons ? (...)