
Trois mois sur la route !
Le 6 juin, la Caravane Féministe de la Marche Mondiale des Femmes qui voyage à travers l’Europe a accompli désormais trois mois sur la route. Durant ces mois, nous sommes passées par ce qui est considéré comme l’Europe de l’Est à ce qui est considéré comme l’Europe de l’Ouest. Nous sommes parties du Kurdistan et de Turquie puis sommes allées en Grèce, en Roumanie, en Bulgarie, au Kosovo, en Serbie, en Bosnie Herzégovine, en Croatie, en Autriche, en Suisse et nous sommes actuellement en France.
Les luttes des femmes que nous avons rencontrées ont confirmé nos analyses en tant que mouvement anti-patriarcal, anticapitaliste, anticolonialiste et antimilitariste dans le contexte international. Nous avons entendu des
témoignages de femmes qui vivent au quotidien la militarisation et les guerres non conventionnelles, avec des
armées privées ou fondamentalistes, et voient comment elles créent de nouvelles frontières artificielles qui séparent
leurs familles et communautés, prennent le contrôle de leurs ressources naturelles, de leur force de travail et de leur
corps.
On a entendu comment les terres, l’eau et les graines sont appropriées en Turquie et en Autriche pour
générer de l’énergie pour une élite qui ne travaille qu’à la maximisation de son profit individuel. On a entendu
comment les politiques d’austérité néolibérales, capitalistes et individuelles essaient de pousser les femmes dans les
espaces privés en Grèce, en Bosnie ou en Croatie, mais aussi en Autriche ou en Suisse.
Dans chaque pays, nous avons entendu comment des groupes fascistes et des groupes fondamentalistes et
conservateurs de différentes religions essaient à la fois de contrôler le corps, le travail et la sexualité des femmes en
imposant un modèle hétéro normatif, en attaquant notre autonomie et droit à l’avortement, en nous traitant
comme les incubatrices de leurs aspirations nationalistes.
On a vu comment ce modèle hégémonique de société
essaie de nous embrouiller en faisant croire que nos luttes ne sont pas nécessaires et en cachant le fait que s’il y’a
quelques femmes à des positions de pouvoir, c’est au prix de tant de femmes qui sont opprimées dans le monde
entier.
Dans tout ce processus de contrôle et de recul, nous avons rencontré des femmes qui résistent et qui avancent
avec des alternatives, qui créent de nouveaux moyens de communication, traversent des frontières artificielles et dépassent les barrières linguistiques, en créant des réseaux de solidarité et des liens communautaires. Elles se
battent collectivement contre les violences quotidienne dont elles souffrent, en plantant des arbres pour reprendre
leurs territoires face à de méga projets, en échangeant leurs savoirs et leurs semences et en disant "Non" à la
marchandisation de la nature, en occupant les rues pour obtenir le droit d’exercer librement leur sexualité et leur
droit à l’espace public, en construisant de nouveaux modèles économiques et de vie communautaire, basés sur
l’horizontalité et la solidarité, reprenant la mémoire et en rendant
visible les violences que les femmes subissent
pendant les guerres ; elles se lèvent pour dénoncer la xénophobie, le racisme, l’antisémitisme et le fascisme, luttent
contre les violences masculines contre les femmes et montrent leur solidarité avec les femmes du monde entier.
Pendant ce voyage, la Caravane a créé des liens, connecté des luttes et les a renforcées. En plus de toutes ces
résistances, la Caravane en elle-même est une expérience de vie communautaire auto-organisée, de résolution de
conflit, de co-existance avec différentes cultures politiques, mais avec le même but : en finir avec ce modèle
mortifère -ce système capitaliste, patriarcal, raciste, colonialiste -et fonder une société réellement égalitaire, juste,
solidaire et libre.
Enfin, il
apparaît clairement qu’il y a ce qui est appelé le "Sud"
(cet à dire, la pauvreté) dans les pays
les plus riches
(qui sont
appelés
le "Nord"
)
et que plus que jamais en tant que féministes nous devons le reconnaître et
travailler pour renforcer nos luttes avec toutes les femmes en Europe, de toutes les générations. Tant que des
femmes seront opprimées, il n’y aura pas d’égalité
et nous ne lâcherons pas ; et c’est pourquoi nous disons : Nous
serons en marche jusqu’à que toutes les femmes soient libres