
Il ressort des informations recueillies par le Défenseur des droits lors de sa visite du 30 juin 2016 à Calais, et de certaines déclarations dans la presse, que l’évacuation de la zone Nord du bidonville jouxtant le centre Jules Ferry pourrait être réalisée dans les prochaines semaines.
Le Défenseur des droits n’a eu de cesse de dénoncer les conditions de vie indignes des exilés résidant sur ce terrain. C’est d’ailleurs au vu des constats dressés dans son rapport d’octobre 2015 que le juge des référés du Conseil d’Etat a estimé que la carence de l’Etat était de nature à exposer ces personnes à des traitements inhumains ou dégradants. Il est donc évident que le Défenseur ne se prononce pas en faveur du maintien d’un tel bidonville.
Toutefois, le démantèlement d’un campement dans lequel les exilés viennent de se réinstaller après que la zone Sud de ce même terrain a été évacuée, ne semble pas pouvoir être réalisée avant que des solutions pérennes et respectueuses des droits fondamentaux des migrants ne soient entreprises en amont.
Des obligations incombant aux pouvoirs publics découlent en effet de prescriptions européennes et internationales, rappelées dans la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, et s’imposent à l’égard de tout occupant sans droit ni titre. Ils semblent qu’elles s’appliquent a fortiori à l’égard des exilés vivant sur la lande de Calais, lesquels ne sont pas des occupants irréguliers comme les autres puisqu’ils ont été invités à s’y installer par les pouvoirs publics.
Les expulsions des terrains doivent d’abord se faire dans le respect du droit à la protection du domicile et du droit à ne pas être privé d’abri. (...)
L’évacuation de ce terrain, pour être conforme au droit, ne saurait être mise à exécution avant que les pouvoirs publics aient recherché de véritables solutions alternatives d’hébergement.
Les expulsions des terrains doivent ensuite se faire dans le cadre du maintien de l’accès aux autres droits fondamentaux, la scolarisation et le suivi médical. (...)
aujourd’hui, autant de migrants vivent sur la zone Nord que sur la zone Sud avant le démantèlement mais sur une surface plus restreinte, favorisant la promiscuité et les tensions entre migrants. Sans véritable anticipation respectueuse des principes précédemment exposés, une nouvelle évacuation conduirait à accentuer encore une fois l’état de vulnérabilité des exilés déjà éprouvés par un parcours migratoire très difficile. Mais surtout, cette tentative de faire disparaitre les exilés en même temps que leurs abris serait vaine.
Le Défenseur des droits a d’ailleurs maintes fois constaté, à travers les réclamations dont il est saisi, que le défaut d’anticipation de ces opérations d’expulsion est contreproductif puisqu’il ne fait que déplacer le problème vers un autre site, imposant aux exilés un « nomadisme » forcé. »