
Plusieurs pays d’Asie, Afrique ou Amérique du Sud demandent à ce que la délivrance de brevets sur des ressources génétiques soit plus encadrée au niveau international, via l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Car ces pays sont aujourd’hui inquiets de brevets délivrés sans que l’origine du matériel breveté ne soit déclarée obligatoirement et des cas de biopiraterie se multiplient en conséquence. Les discussions en ce sens au sein de l’OMPI complètent et recoupent celles en cours à la Convention sur la Diversité Biologique sur les informations numérisées de séquences, augurant d’éventuels chamboulements dans le domaine de la propriété industrielle sur le vivant.
Aujourd’hui, comme les animaux ou les micro-organismes, les plantes, leurs parties et composantes génétiques, peuvent faire l’objet de brevets. Lorsque ces plantes font partie du patrimoine de pays, de communautés autochtones ou locales, leur utilisation par une partie tierce est normalement conditionnée à un accord et un partage des bénéfices [1]. Mais, alors que plusieurs pays se plaignent déjà de biopiraterie sur certaines de leurs ressources génétiques, la numérisation des génomes (voir plus bas) de plantes pourrait accroître le nombre de cas en facilitant l’accès au brevet sans avoir à demander un accord ni à partager les bénéfices. Une éventualité qui dépend du fruit de discussions en cours.
C’est l’OMPI qui devrait décider sur les brevets (...)
Brevet et partage des avantages
Les États membres de l’OMPI discutent d’une demande de pouvoir « assurer et vérifier le respect des régimes régissant l’accès et le partage des avantages » en imposant aux demandeurs de brevets de renseigner obligatoirement la source ou l’origine de la ressource génétique utilisée pour mettre au point leur invention. De même qu’ils devraient « fournir la preuve du consentement préalable en connaissance de cause et du partage des avantages ». Une obligation d’information qui est nommée « divulgation » (...)
Un système international réclamé par beaucoup de pays
Divulgation ou mesures défensives font partie de discussions plus larges sur un éventuel instrument juridique international consacré aux questions de propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques, aux savoirs traditionnels et au folklore. Un cadre international réclamé par certains pays pour faire face à la situation que Ian Goss, président de l’IGC, décrit ainsi : « plus de 25 régimes nationaux de divulgation de brevets relatifs aux ressources génétiques ont été mis en place et leur nombre ne cesse de croître. En l’absence d’accord à échelle internationale, ces régimes nationaux ont varié, parfois considérablement » [9]. Or, toujours selon Ian Goss, l’IGC risque d’être « dépassé par les différents efforts nationaux et régionaux, ce qui pourrait engendrer un environnement politique et réglementaire international fragmenté [et] compromettre les efforts déployés par les détenteurs de ressources génétiques, de savoirs traditionnels et d’expressions culturelles traditionnelles visant à protéger, dans le cadre du système de la propriété intellectuelle, leurs intérêts moraux et économiques légitimes ».
Pour l’instant, les 191 pays membres de l’OMPI semblent être dans une impasse du fait de leurs divergences politiques. Nombreux sont ceux réclamant un tel cadre international à l’instar des pays africains, des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), des pays d’Asie et du Pacifique ou des pays d’Amérique latine et des Caraïbes. (...)
l’Assemblée générale 2018 de l’OMPI a finalement demandé à l’IGC d’accélérer ses travaux, confirmant au passage que les questions propres aux ressources génétiques seraient « examinées lors du point sur l’état d’avancement qui sera fait à la quarantième session » avec une nouvelle proposition de texte législatif, du 17 au 21 juin 2019. D’ici là, du 18 au 22 mars 2019, l’IGC, réuni à Genève, aura – peut-être - avancé sur une proposition consensuelle d’un instrument réglementaire international...