
Alors que l’intérim du pouvoir n’est pas encore assuré, l’ancien président indigène affirme être visé par un mandat d’arrêt. Les dirigeants du Tribunal électoral qui avaient validé les triches menant à sa réélection ont été arrêtés.
Après la démission du président Evo Morales, dimanche, lâché par la police et la justice après trois semaines de protestations contre sa réélection, la Bolivie n’est plus dirigée. Cette démission a été suivie de celles du vice-président, de la présidente du Sénat, et du président de la Chambre des députés, qui auraient dû en cascade assurer l’intérim.
Vers 22h30, heure locale (2h30 du matin en France, ce lundi), Evo Morales a annoncé qu’un mandat d’arrêt « illégal » avait été émis contre lui. Une information démentie par le commandant de la police, Vladimir Yuri Calderon, mais confirmée par l’un de ses principaux opposants, Fernando Camacho, qui affirme qu’il se cache avec quelques fidèles soldats, et un avion, dans le Chapa (...)
Le commandant de la police a cependant affirmé que les magistrats du Tribunal suprême électoral (TSE) étaient visés. C’est cette instance que Morales avait tenté de renouveler samedi, espérant calmer la grogne et se maintenir au pouvoir. La police a arrêté la présidente du TSE, Maria Eugenia Choque, et le vice-président, Antonio Costas, sur ordre du parquet qui enquête sur des irrégularités commises dans le scrutin d’octobre. Tous deux, emmenés par des hommes encagoulés ou masqués, ont été présentés aux médias au pied d’une estrade où se trouvaient assis des gradés de la police.
Soutenu par les présidents cubain et vénézuélien
Retranché dans son fief politique, la zone de production de feuille de coca de Chimoré, dans la région de Cochabamba, dans le centre du pays, Evo Morales est l’un des derniers représentants de la « vague rose » qui a déferlé au tournant des années 2000 sur l’Amérique latine, faisant virer à gauche le Brésil, l’Argentine, le Chili, l’Équateur et le Venezuela.
La majorité de ces pays ont depuis basculé à droite. (...)
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– Après la démission d’Evo Morales, la Bolivie plonge dans l’inconnu
(...) C’est un véritable séisme politique en Bolivie. Le président, Evo Morales, au pouvoir depuis près de quatorze ans, a annoncé sa démission, dimanche 10 novembre, après trois semaines d’intense contestation sociale.
Une démission qui semblait l’unique issue possible tant le chef de l’Etat était acculé de toutes parts. Au cours de la journée de dimanche, Evo Morales a été lâché par nombre de ses soutiens et a dû faire face à des démissions en cascade. (...)
L’armée bolivienne avait recommandé au chef de l’Etat de démissionner, jugeant qu’une telle décision contribuerait à restaurer le calme dans le pays. « Après avoir analysé le conflit national, nous demandons au président de renoncer à son mandat présidentiel, de permettre le rétablissement de la paix et la restauration de la stabilité dans le pays », a déclaré à la presse le commandant des forces armées terrestres, Williams Kaliman.
La plupart des ministres et des dizaines de sénateurs et députés ont présenté leur lettre de démission. « Le cours des événements va à l’encontre de mes principes personnels, ainsi que de mes valeurs spirituelles et démocratiques, et donc cela m’empêche de continuer à la tête du portefeuille d’Etat que je dirige », a écrit le ministre des hydrocarbures, Luis Alberto Sanchez, dans une lettre envoyée au président et publiée sur son compte Twitter, peu après l’annonce de démission du ministre des mines.
« Il y a eu des mutineries dans les forces de police, l’armée est neutralisée – elle a déclaré qu’elle n’utiliserait pas la force contre le peuple bolivien – Evo Morales vient de perdre le soutien de la Centrale ouvrière bolivienne (COB), l’un de ses plus fidèles soutiens. Sa démission semble inévitable », jugeait pour sa part le politiste Marcelo Silva, ancien conseiller politique du Mouvement vers le socialisme (MAS, le parti au pouvoir), quelques heures avant l’annonce du chef de l’Etat.
Le Mexique a offert l’asile à Evo Morales et accueilli dans son ambassade à La Paz des fonctionnaires et des parlementaires boliviens.
Scènes de liesse à La Paz, Sucre, Santa Cruz...
Dans cette période de vacance totale du pouvoir, la deuxième vice-présidente de la chambre haute, l’opposante Jeanine Anez, a revendiqué dimanche son droit à devenir chef de l’Etat par intérim. « Je suis la deuxième vice-présidente et dans l’ordre constitutionnel, je devrais assumer ce défi avec le seul objectif d’appeler à de nouvelles élections », a-t-elle déclaré sur la télévision Unitel. Des députés pourraient aussi vouloir réunir une commission d’intérim, fixant la date de nouvelles élections. (...)
Luis Fernando Camacho s’est déjà positionné. Vêtu d’un gilet pare-balles, juché sur une voiture de police, il est allé à la rencontre de la foule. Dimanche après-midi et tard dans la soirée soir, les scènes de liesse après la démission de l’ancien berger de lamas, ont rassemblé des milliers d’opposants sur la place Murillo à La Paz, face au palais présidentiel, à Sucre, la capitale constitutionnelle, à Santa Cruz, à 900 km de La Paz. (...)
– Evo Morales, président de la Bolivie, démissionne
(...) “Je renonce à mon poste de président”, a déclaré à la télévision le leader indigène de 60 ans, au pouvoir depuis 2006 et dont l’armée et la police venaient de réclamer le départ. La veille, le président bolivien avait appelé les partis d’opposition au dialogue, une proposition unanimement rejetée.
“Le coup d’État a eu lieu”, a ajouté, à ses côtés, le vice-président Alvaro Garcia Linera, qui a aussi démissionné. (...)
Retranché dans son fief politique, la zone de production de feuille de coca de Chimoré, dans la région de Cochabamba située dans le centre du pays, Evo Morales a finalement cédé aux appels au départ en fin d’après-midi. Dénonçant comme une “décision politique” l’appel de l’Organisation des États américains (OEA) à l’organisation d’un nouveau scrutin, il a affirmé : “Mon péché est d’être indigène, d’être producteur de coca”. (...)
Né dans la misère, cet ancien berger de lamas avait gravi les échelons syndicaux jusqu’à devenir il y a 13 ans le premier chef d’État indigène du pays. Il est l’un des derniers représentants de la “vague rose” qui a déferlé au tournant des années 2000 sur l’Amérique latine, faisant virer à gauche le Brésil, l’Argentine, le Chili, l’Équateur et le Venezuela, la majorité de ces pays ayant depuis rebasculé à droite.
Dimanche soir, il a d’ailleurs reçu le soutien immédiat des dirigeants socialistes voisins.
Trois semaines de crise, 3 morts et près de 400 blessés (...)
Visé par des manifestants qui ont incendié sa maison à Potosí (sud-ouest), le président de l’Assemblée nationale, Victor Borda, a démissionné, imité selon la télévision bolivienne par une dizaine de députés.
Peu après, le ministre des Mines, César Navarro, a également renoncé à son poste, disant vouloir “préserver (sa) famille” après l’incendie de sa maison et l’agression de son neveu. “Le cours des événements va à l’encontre de mes principes personnels, ainsi que de mes valeurs spirituelles et démocratiques”, a aussi écrit le ministre des Hydrocarbures, Luis Alberto Sanchez, dans sa lettre de démission publiée sur Twitter. (...)
Le scrutin du 20 octobre avait abouti à la réélection d’Evo Morales pour un quatrième mandat jusqu’en 2025, une option pourtant rejetée par la population lors d’un référendum en février 2016. Son score annoncé par le TSE, dépassant de plus de 10 points celui de Carlos Mesa, avait aussitôt été qualifié de frauduleux par l’opposition.
Les signes d’aggravation de la situation se multipliaient ces derniers jours, avec des mutineries d’unités policières dans plusieurs régions du pays et l’occupation de médias d’État par des manifestants.