
Déploiements militaires, possible coupure des télécommunications… Les ambassades occidentales craignent une nuit de répression par l’armée du mouvement de contestation contre le coup d’État en Birmanie.
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Des militaires sont en train de se déployer dans Rangoun et les télécommunications pourraient être perturbées dans la nuit, a mis en garde au soir du dimanche 14 février l’ambassade américaine en Birmanie, faisant craindre une répression par l’armée du mouvement de contestation contre le coup d’État.
Nous avons reçu "des indications de mouvements de troupes à Rangoun", la capitale économique, et "une interruption des télécommunications est possible cette nuit de 1h à 9h", heures locales (de 18h30 à 2h30 GMT), a tweeté la représentation diplomatique américaine.
Un peu plus tôt, des chars ont été brièvement aperçus dans les rues de la plus grande ville birmane, sous couvre-feu depuis 20h.
Cinq journalistes arrêtés
Dans le nord de la Birmanie, les forces de l’ordre ont dispersé dimanche un rassemblement en tirant sur des manifestants, d’après une journaliste locale.
"Ils ont d’abord lancé du gaz lacrymogène, puis ont tiré", a-t-elle déclaré à l’AFP, sans pouvoir préciser si les tirs ont été effectués à balles réelles ou avec des munitions en caoutchouc.
Cinq journalistes ont été interpellés à cette occasion, d’après un média local.
La peur des représailles est dans tous les esprits dans ce pays où les derniers soulèvements populaires de 1988 et 2007 ont été réprimés dans le sang par les militaires. D’autant que la mobilisation contre le coup d’État, qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi le 1er février, ne faiblit pas. (...)
Plusieurs ambassades occidentales en Birmanie ont exhorté dimanche l’armée à "ne pas recourir à la violence" contre les manifestants. (...)
À Rangoun, ils se sont notamment réunis près de la célèbre pagode Shwedagon, pour réclamer la fin de la dictature et la libération de la lauréate du prix Nobel de la paix 1991, tenue au secret depuis son arrestation.
Près de la gare centrale, des habitants ont bloqué une rue à l’aide de troncs d’arbres pour empêcher la police de pénétrer dans le quartier. Ils ont ensuite reconduit des policiers, arrivés pour chercher des employés des chemins de fer grévistes et les forcer à reprendre le travail.
À Dawei (sud), sept policiers ont annoncé faire défection, tandis que des médias locaux ont fait état de cas similaires ces derniers jours.
L’armée a de son côté diffusé une liste de sept militants parmi les plus renommés de Birmanie, qu’elle recherche activement pour avoir encouragé les manifestations. (...)
Comités de vigilance contre les arrestations
Depuis le putsch, environ 400 personnes ont été arrêtées, des responsables politiques, des militants et des membres de la société civile, y compris des journalistes, des médecins et des étudiants.
Parmi la liste des sept "fugitifs", figure Min Ko Naing, un leader du mouvement étudiant de 1988, qui a déjà passé plus de 10 ans en prison.
"Ils arrêtent les gens la nuit et nous devons être prudents", a-t-il déclaré quelques heures avant l’émission de son mandat d’arrêt.
"Ils pourraient sévir avec force et nous devrons être préparés" a-t-il ajouté dans une vidéo publiée sur Facebook, malgré l’interdiction faite par la junte d’utiliser cette plate-forme.
Le général Min Aung Hlaing a donné samedi des pouvoirs d’exception aux forces de l’ordre, qui peuvent procéder à des perquisitions sans mandat ou détenir des personnes pour une courte période sans l’autorisation d’un juge.
En réaction aux arrestations, des comités de vigilance citoyenne ont vu spontanément le jour à travers la Birmanie (...)
Certains Birmans craignent aussi que la libération massive cette semaine de plus de 23 000 prisonniers par l’armée n’ait été orchestrée pour semer le trouble en relâchant des individus peu recommandables, tout en faisant de la place dans les prisons pour les détenus politiques.
Avertissement aux médias
La situation a fait l’objet de nombreuses condamnations internationales depuis deux semaines, Washington détaillant une série de sanctions à l’encontre de plusieurs généraux. (...)