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Mediapart
Biélorussie : à peine réélu, Loukachenko opte pour la force
Article mis en ligne le 11 août 2020

Sans surprise déclaré large vainqueur (80,2 %) d’une présidentielle sans crédibilité dimanche, l’autocrate biélorusse commence son sixième mandat dans un climat de tension maximale. Manifestations, arrestations et violences policières ont secoué le pays dans la soirée. (...)

C’était prévisible : Alexandre Loukachenko a choisi la manière forte pour garder son siège. Mais de nombreux Biélorusses semblent ne plus vouloir se laisser faire et ont laissé parler leur colère, dimanche soir. Comment pouvait-il en être autrement, alors que de nombreux éléments matériels ou témoignages – notamment de chefs de bureaux de vote qui ont osé donner leurs vrais résultats – attestent de l’absurdité du score officiel en faveur du leader biélorusse ?
Après une campagne populaire, l’inattendue opposante à Loukachenko, Svetlana Tsikhanovskaïa, professeure d’anglais, mère de famille et novice en politique, n’a finalement été créditée que de 9,9 % des voix par la commission électorale, malgré une très forte participation, à 84%. Ces dernières semaines, plusieurs études indépendantes, ainsi que des sondages réalisés à la sortie des urnes, anticipaient pourtant un résultat quasiment inverse (70 %) en sa faveur… Son score final humiliant ne pouvait que mettre le feu aux poudres d’une opposition et d’une jeunesse biélorusses voyant leur vote bafoué.
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Dans une trentaines de villes de Biélorussie (dont Brest, Homiel ou Grodno), surtout dans la capitale, Minsk, des milliers de citoyens sont descendus dans la rue, avant même le résultat, couru d’avance. Le « dernier dictateur d’Europe », comme il est parfois surnommé, sait bien que son soutien populaire, encore appuyé jusqu’en 2010, est aujourd’hui bien faible. Il avait donc prévu le coup en visitant de nombreuses casernes militaires et unités de police en amont du vote, au cas où les choses se corsaient.
Assuré, pour l’heure, du soutien de ses forces de l’ordre, Loukachenko a eu loisir de les envoyer face aux manifestants, dimanche soir. Minsk a rapidement ressemblé à une ville sous loi martiale puis en état de siège
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un décès est vraisemblablement à déplorer chez les manifestants, selon plusieurs sources, dont le groupe de défense des droits humains Viasna. L’homme aurait été écrasé par un camion de police roulant à travers la foule. Une information sortie malgré la coupure d’Internet dans de très nombreux quartiers de la capitale.
Alexandre Loukachenko ne semble donc pas vouloir faire la moindre concession ou même reconnaître le feu dans la demeure 
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Les mois à venir seront décisifs à Minsk. L’opposition et la société civile biélorusses, qui ont repris goût à l’engagement civique au gré de cette campagne unique en son genre, ne vont pas en rester là, fortes d’un soutien semble-t-il majoritaire dans le pays.Si le satrape de Minsk reste donc au pouvoir, cette présidentielle 2020, beaucoup plus mouvementée et ardue que prévu, pourrait bien marquer un tournant. Le régime pourrait être, à moyen terme, menacé. Car les élucubrations et menaces de Loukachenko n’amusent plus personne. (...)

l’Union européenne (UE) vient de répondre fermement à Minsk dans un communiqué, condamnant « l’inacceptable et disproportionnée violence d’État à l’encontre de manifestants pacifiques ».
« La répression violente n’a pas sa place en Europe », a ajouté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dans un tweet, demandant un nouveau décompte des votes. Partout, les images de manifestants en sang dans Minsk ont choqué. De son côté, le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a dit « soutenir le peuple biélorusse dans sa quête de liberté ». Son pays a demandé la tenue d’un sommet extraordinaire de l’UE sur la situation.
Même à Moscou, la cote de Loukachenko est désormais très entamée, lui qui attaque de plus en plus la Russie en brandissant une floue « menace russe ».
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