
Une lecture de notre projet « Vers l’Ecole commune », même en diagonale, suffit pour s’en convaincre : l’Aped souhaite ardemment une refonte de la formation initiale de tous les enseignants.
Mais devions-nous pour autant participer à l’évaluation initiée par la Communauté française ? La question s’est posée. C’est en tout cas avec une grande circonspection que nous le faisons. Nulle part, en effet, dans le discours officiel, il n’est fait mention d’autre chose que de “mieux outiller les futurs enseignants face à l’évolution de la société”. Or, selon nous, justement, l’Ecole n’a pas pour finalité d’adapter les jeunes au monde tel qu’il évolue. Au contraire, elle doit les outiller pour comprendre le monde et être à même de le changer. En amont, en toute logique, la formation des enseignants doit aller dans ce sens.
Notre appréhension est d’autant plus grande que l’idée de réformer la formation initiale s’inscrit dans un contexte marqué par l’idéologie et les avancées néolibérales.
Le courant qui domine aujourd’hui l’Ecole est celui de la marchandisation (privatisations, soumission de l’institution scolaire aux “impératifs économiques”, logique de l’approche-métier, extension de l’alternance, CPU, compétences, etc.).
Le projet de refonte de la formation initiale est dans le droit fil des politiques européennes (du processus de Bologne – harmonisation et pilotage de l’enseignement supérieur – à la déclaration de Lisbonne - l’objectif européen de devenir “l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde”), qui visent à créer le vaste marché fantasmé par les milieux d’affaires.
Théorie du complot ? Non : cette logique est omniprésente dans la Déclaration de politique communautaire 2009/2014. Un échantillon : « L’enseignement doit évoluer avec le monde qui l’entoure. En même temps, le monde économique a besoin de l’enseignement pour engager des personnels compétents compte tenu des départs à la pension qui s’annoncent et de l’émergence de nouveaux métiers. La collaboration entre ces deux mondes doit donc se renforcer, que ce soit à travers la formation aux métiers en pénurie, l’ancrage de la formation en cours de carrière des enseignants dans la réalité des métiers ou les instances de dialogue et de collaboration (Service francophone des métiers et des qualifications, bassins de vie, Service Ecoles – Entreprises, etc.). » (p. 62, c’est nous qui soulignons) (...)