
S’il est vrai qu’il existe une violence endémique qui accompagne nos semblables depuis les temps historiques et même préhistoriques puisque guerres, meurtres, viols, invasions, génocides, actes de torture et esclavage semblent consubstantiels à l’humanité, alors peut se poser pour chacun la question de son origine, d’autant qu’on ne parle pas de violence pour d’autres animaux dont l’existence surtout réglée par l’instinct se limite aux fonctions habituelles de l’espèce.
(...) l’histoire des hommes et l’expérience montrent qu’il est impossible d’éradiquer la violence sans détruire la vie. Il est seulement envisageable de la penser pour tenter de la contenir, ce qui demande un certain travail, afin d’essayer de l’infléchir momentanément vers d’autres buts en s’appuyant sur une éducation et une prise de conscience aussi larges que possible qui favorisent l’élaboration de nouveaux projets et leur soutien par des mouvements sociaux déterminés. Il faut pourtant convenir que notre société hédoniste ne va guère dans ce sens. En dernier ressort on peut constater que la vie elle-même semble s’édifier sur la pulsion d’emprise et sur un cannibalisme avide qui incorpore le monde tout en le détruisant, dans une étrange proximité entre Éros et Thanatos qui fait de chaque être humain le Janus du désir et de la nécessité. Il n’est cependant pas interdit de rechercher un peu de paix ou de sagesse comme antidotes aux excès de violence, et même de lutter contre ceux-ci pour préserver un humanisme patient sans lequel nos sociétés, et sans doute notre espèce, courent le risque de ne pouvoir survivre ou de perdre leur nature.