
En dépit d’inégalités sociales accablantes, la gauche avait quasiment disparu de la scène politique libanaise. Avec le soulèvement et l’apparition de nouvelles formes de socialisation, la jeunesse commence à la faire renaître.
« Au Liban, on ne peut être qu’à gauche. » C’est une phrase que l’on entend souvent, pas seulement d’un bout à l’autre du pays mais aussi parmi les membres de la diaspora, tant le niveau des inégalités est criant.
Cependant, hormis quelques groupes à la marge et un Parti communiste divisé, la gauche est la grande absente de la scène libanaise. Dans les débats politiques, on la voit très peu et elle ne compte plus un seul député se réclamant d’elle au Parlement.
Pourtant, sur tous les lieux où la contestation s’exprime, c’est bien une colère de gauche qui gronde dans les slogans qui conspuent les banques et la classe politique. Dans les cafés ou à l’université, on parle aussi d’intifada et de la thawra (révolution).
Sur les tee-shirts, Che Guevara a fait son retour, de même que les keffiehs noirs et rouges sur les épaules. Dans les chansons des manifestations, on reconnaît le refrain de « Je suis le peuple en marche » du chanteur égyptien Cheikh Imam, pourtant disparu il y a 25 ans mais qui évoquait si bien les peines et les difficultés de vivre des plus humbles.
La gauche est donc à la fois absente et présente. Absente en tant qu’organisation politique mais bien présente dans les esprits, les idées, les symboles. (...)
Depuis que le Liban s’est jeté à corps perdu dans le libéralisme le plus extravagant – au point que le terme figure dans la Constitution –, avec, pour conséquence, des inégalités qui atteignaient, avant la crise actuelle, des records mondiaux, la gauche a devant elle un beau boulevard.
Mais elle n’en a jamais tiré profit et a même souvent préféré s’intégrer à la classe politique affairiste. Ce boulevard, l’actuelle crise financière l’a encore élargi. (...)
Des services publics de base, comme l’éducation, la couverture médicale, ne sont pas assurés. Des infrastructures essentielles comme l’eau, l’électricité ou la gestion des déchets non plus, au point que la question de savoir s’ils sont publics ou privés est secondaire. Ils ne sont tout simplement pas fournis, en raison de la défaillance de l’État. » (...)