
Alors que le « pays de la samba » traverse la pire crise de son histoire récente, la chanteuse brésilienne Ana Guanabara sort un album qui réunit quatorze morceaux emblématiques de l’expression de la population afro-brésilienne des quartiers pauvres de Rio de Janeiro. Ana Guanabara y exprime son admiration pour cette culture et les valeurs qu’elle porte, convaincue qu’elle peut être un outil de résistance en ces temps de régression démocratique et de répression populaire. Rencontre en France, à Montreuil, où elle vit depuis plus de vingt ans.
Si les clichés réduisent ce style musical à une allégresse insouciante et débridée, on ignore généralement qu’il plonge ses racines historiques dans l’expression de la population afro-brésilienne des quartiers pauvres de Rio de Janeiro, en quête de dignité et de la reconnaissance de son identité. Aussi, quand le président Jair Bolsonaro dénigre le carnaval « dépravé », c’est une attaque frontale à la diversité sociale et culturelle du peuple brésilien.
Première interprète féminine à dédier tout un album à ces musiques, Ana Guanabara, qui a grandi à Rio de Janeiro, l’a majoritairement composé de sambas-enredos des années 1970, en plein âge d’or de cette affirmation culturelle populaire. Et cet hommage est indissociable de la qualité artistique de cette époque, souligne la chanteuse, qui met en exergue la richesse mélodique et poétique d’un genre musical reconnu en premier lieu pour son exubérance percussive.
Avec cet album, Ana Guanabara exprime son admiration pour cette culture et sa reconnaissance pour sa valeur, convaincue qu’aujourd’hui comme lors des décennies passées, elle peut être un outil de résistance en ces temps de régression démocratique et de répression populaire. Rencontre en France, à Montreuil (93), où elle vit depuis plus de vingt ans. (...)
L’année dernière, l’école de samba Paraíso do Tuiuti, qui a manqué de justesse la première place du concours des défilés, exposait la farce du coup d’état judiciaro-parlementaire de 2016 en présentant Michel Temer, le remplaçant de Roussef, comme un vampire de la société brésilienne. Dénonçant les horreurs de l’esclavage et doutant de son abolition effective, son samba-enredo exhortait à la réelle libération des populations défavorisées, essentiellement des afro-descendants.
Tandis que Beija-Flor, l’école de samba qui a remporté cette édition, s’est inspirée du personnage de Frankenstein pour poser la question : qui sont les véritables monstres ? Les délinquants et marginaux abandonnées par l’État, ou bien les élites économiques qui les engendrent et les méprisent ? (...)
Dans le contexte politique et social désastreux que traverse le Brésil aujourd’hui, qui voit se renforcer les inégalités, les racismes et les discriminations, ces manifestations très médiatisées soutiennent la lutte des populations marginalisées pour la reconnaissance de leurs droits et de leur valeur. (...)
Ce patrimoine musical est un véritable joyau de la culture populaire afro-brésilienne. Il est pourtant peu connu et très peu exploité par l’industrie phonographique ! Le répertoire de mon album comprend notamment plusieurs des airs qui ont illuminé mon enfance, dans ces années 1970 qui ont connu une profusion de sambas-enredos très riches du point de vue mélodique et poétique (...)
L’album « Sambas enredos », enregistré à Rio avec une équipe de fins connaisseurs du genre, est en ligne depuis le 21 juin sur les plateformes internet.
– Et le 4 juillet prochain Ana Guanabara donne un concert de lancement.
au Centre culturel Paul B à Massy (91), accompagnée de Rodrigo Samico, Nelson Ferreira, Júlio Gonçalves, MAO di Sampa ainsi que par les choristes de Théâ-Chœur/Chœur en Scène dirigés par Emmanuèle Dubost.