
Le sexe de l’économie... C’est le thème de notre prochain colloque, le 29 mars. Voici une première enquête sur le sujet. Les aides à la création d’entreprise et à la création d’emplois sont rarement analysées sous l’angle du genre. Pourtant, elles sont loin d’être neutres. Et bénéficient plus aux hommes qu’aux femmes.
Au moment du vote de la loi Tepa, rares ont été les voix dénonçant l’impossibilité pour nombre de femmes de bénéficier de la défiscalisation des heures supplémentaires, et plus généralement du "travailler plus pour gagner plus". Tout simplement parce qu’elles assument encore aujourd’hui 80% des tâches domestiques et parentales, ce qui leur permet difficilement d’engranger des heures sup’. Double peine. C’est ainsi : "En France, les analyses genrées des politiques économiques ne sont quasiment jamais faites", constate Isabelle Guéguen, consultante en égalité professionnelle et innovation sociale, cofondatrice du cabinet de conseil Perfégal.
Pas de chiffres, pas de problèmes ? (...)
Les rares études qui ont été réalisées apportent pourtant la confirmation de ce que l’on pressent : les politiques publiques économiques ne sont pas neutres. Elles ont un sexe. Définitivement masculin. (...)
Les résultats sont sans appel : au moment de l’étude, les femmes représentaient à peine 22% des bénéficiaires de cette aide à la création d’entreprise alors qu’elles constituaient 34% des créateurs d’entreprise de moins de trente ans dans le Finistère. Elles étaient moins de 10% à recevoir l’aide aux très petites entreprises alors qu’elles représentaient 31% de la population visée. De plus, les emplois créés par cette dernière aide étaient à 83% destinés à des hommes...
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Forte de ces constats, Isabelle Guéguen a pu délivrer quelques recommandations : ouvrir les aides à d’autres secteurs comme les services d’aide à la personne ou le commerce en milieu rural, d’une part ; augmenter la barrière d’âge à 35 ans pour les jeunes créateurs d’entreprise, d’autre part. Ces changements simples ont eu un effet radical et quasi immédiat. "En trente mois, la part des femmes bénéficiaires de la bourse d’aide à la création d’entreprise a bondi à 48%", souligne Isabelle Guéguen.
Un résultat encourageant... Une autre recommandation n’a, elle, pas été retenue, celle de donner un bonus aux très petites entreprises recrutant une femme pour un emploi dit "masculin", dans le cadre des aides aux très petites entreprises "L’idée du bonus pose problème, les élus ont du mal à passer à cette étape supérieure", constate Isabelle Guéguen.
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Ce type d’étude est malheureusement plutôt l’exception que la règle. Aujourd’hui, dans les collectivités, on en est encore à un (gros) travail de sensibilisation... (...)