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À quoi ressemble le féminisme dans le Caucase du Nord ?
#Russie #feminisme #femmes
Article mis en ligne le 9 avril 2023
dernière modification le 8 avril 2023

Qu’est-ce qui rend les femmes du Daghestan, de Tchétchénie et d’Ingouchie plus vulnérables ? Qui les aide à lutter pour leurs droits et à échapper aux violences domestiques ? Svetlana Anokhina, journaliste et militante des droits des êtres humains, s’explique.

Depuis plusieurs années, je suis la rédactrice permanente du portail « DAPTAR : espace des femmes dans le Caucase » [https://daptar.ru]. Il a été fondé en 2014 et au début, j’y ai travaillé en tant que journaliste indépendante. Puis je suis devenue rédactrice en chef. Les sujets que nous abordons dans cette publication me tiennent à cœur. Je suis née et j’ai vécu la majeure partie de ma vie au Daghestan, et je comprends très bien les réalités locales. DAPTAR a été créé à l’origine pour montrer tous les aspects de la vie d’une femme dans le Caucase du Nord, y compris les questions culturelles : qui est la femme caucasienne qui « connaît sa place » ? Où se trouve exactement cette « place » ? Veut-elle la « connaître » ? Ensuite, nous avons davantage de documents relatifs aux droits des êtres humains.

Vous avez une section sur le féminisme caucasien sur votre portail. Comment se présente-t-elle ?

Il y a beaucoup de contradictions internes dans le féminisme caucasien et je suis très intéressée à parler aux femmes de ce que le féminisme signifie pour elles, de ce qu’elles ressentent par rapport à ce concept et de ce que elles ont du faire face dans leur vie. Toutes les tentatives des féministes « métropolitaines » de nous dire comment nous comporter, de nous « libérer » et de nous « affranchir » – je dis « nous » car j’ai moi-même peu de relations avec les grandes villes centrales de Russie, et je m’associe très fortement au Caucase – provoquent des tensions parmi nos femmes.

Par exemple, il y a de grandes difficultés lorsqu’il s’agit de hijabs. La manière dont les féministes caucasiennes parlent du hijab depuis plus d’une décennie coïncide avec la tendance moderne à considérer divers phénomènes à travers un prisme décolonial. De nombreuses femmes pensent que le choix de porter le hijab est le résultat de leur propre lutte, qu’elles ont dû faire valoir ce droit. Et la lutte des femmes, la lutte pour le droit d’avoir une opinion, est un phénomène féministe. Cette opinion peut ne pas plaire à ceux qui pensent que le hijab est un signe de la position subordonnée de la femme, et d’une certaine manière, ils ont raison. Mais lorsque quelqu’un commence à dire aux femmes caucasiennes et musulmanes qu’elles doivent immédiatement se débarrasser du foulard et le jeter, il n’est pas très différent des hommes patriarcaux qui disent aux femmes comment se comporter (...)

En 2019, j’avais suffisamment d’expérience dans l’évacuation des femmes et l’assistance dans les affaires pénales. J’ai agi en tant que représentante de la victime dans une affaire de viol collectif. Cette affaire m’a ébranlée, c’était une expérience traumatisante. Et j’ai vu comment de telles affaires sont jugées. (...)

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 (Front line Defenders)
Svetlana Anokhina, journaliste et militante des droits des êtres humains

(...) Les DDH sont souvent victimes de harcèlement, de surveillance, d’agressions physiques, de menaces, de perquisitions et de fouilles de leurs bureaux et domiciles, de campagnes de diffamation et calomnieuses, d’acharnement judiciaire, de détention arbitraire et de mauvais traitements, ainsi que de violations du droit à la liberté d’expression, d’association et de rassemblement. Des DDH ont aussi été assassinés à cause de leur travail. (...)