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À Paris, à bord d’un bus, des avocats bénévoles à l’aide de migrants "démunis"
Article mis en ligne le 2 septembre 2021

Dans le nord de Paris, porte d’Aubervilliers, un bus faisant office de bureau d’avocats prend ses quartiers sur le bord de la route tous les vendredis après-midi. À l’intérieur, des professionnels du barreau de Paris reçoivent gratuitement les migrants qui souhaitent obtenir des conseils sur leur situation. Reportage.

Tahira a l’air perdu, la tête couverte d’un foulard bordeaux orné de petites étoiles. À la main, elle tient anxieusement une pochette contenant de précieux documents administratifs : courriers de l’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (Ofpra) et son certificat de demandeuse d’asile en France, qui expire mi-janvier 2020. Tahira dit avoir quitté en 2016 la région de Sanghar, au Pakistan, où des extrémistes sunnites la menaçaient, ainsi que son mari, tous deux chiites. Après avoir traversé l’Europe, elle a demandé l’asile en France. Par deux fois, la requête de cette mère de famille a été rejetée.

Alors, ce vendredi de mi-décembre, Tahira a décidé de s’adresser à des experts. Elle a pris place à bord d’un bus garé porte d’Aubervilliers à Paris où des avocats conseillent gratuitement, chaque semaine, les personnes migrantes qui se présentent. (...)

Tous les vendredis, entre 14h et 17h, des dizaines de migrants se pressent à l’entrée de ce bus aux allures de car de voyage pour demander des conseils avisés. Chitro, une élève avocate, se charge de faire une première sélection, avant de laisser monter les personnes. À l’intérieur, le véhicule a été aménagé : le fond du bus fait office de salle d’attente et, à l’avant, deux petits espaces constitués de carrés de quatre sièges sont réservés pour les consultations. Pour plus d’intimité, des rideaux violets installés entre l’allée et les sièges sont tirés. (...)

Dans ce bus qui fonctionne grâce au fonds de dotation "Paris solidarité", rattaché au barreau de Paris, les permanences sont assurées à tour de rôle par un vivier de 80 avocats bénévoles, à raison de 2 ou 3 avocats par semaine. Tous ont dû suivre une formation de six heures en droit des étrangers. (...)

"On a été abandonnés par les juges"

Dans le bus, la majorité des personnes se présentent pour des questions relatives aux conditions matérielles d’accueil (CMA), qui portent sur l’hébergement (en Cada, Huda….) et l’allocation accordés aux demandeurs d’asile, l’ADA. "Nous avons de plus en plus de clients qui viennent pour ce genre de dossier. L’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (Ofii) refuse énormément de demandes de CMA", déplore la seconde avocate du jour, Maître Miriana Milich. "Le drame, c’est que nous avons fini par oublier que la CMA est un droit qui résulte du fait qu’on interdit aux demandeurs d’asile de travailler." (...)

Pour l’experte parisienne, la mise en application de la nouvelle loi Asile et immigration en 2018 a ajouté de la confusion. "Les décisions positives rendues par les tribunaux en ce qui concerne les cas que nous traitons sont rarissimes, alors même qu’il y a urgence et que nous avons à faire à des personnes en situation de grande vulnérabilité. On a été abandonnés par les juges."

De fait, parmi les migrants qui se présentent ce jour-là, beaucoup sont des déboutés des tribunaux. (...)