
La mobilisation reste très forte à Notre-Dame-des-Landes, après une fin de semaine marquée par des affrontements violents, qui ont fait une centaine de blessés. Des manifestations de soutien ont eu lieu dans toute la France. En réponse à la tardive proposition de dialogue du Premier ministre, les opposants exigent le retrait immédiat des forces de l’ordre qui sillonnent le bocage et bloquent les routes depuis quatre jours. Reportage dans la « zone à défendre ».
Retour au calme, ce dimanche, dans la châtaigneraie, au cœur de la « zone à défendre » (ZAD) de Notre-dame-des-Landes. Perché en haut d’un arbre, un zadiste fait le guet. Là où de violents heurts ont eu lieu les jours précédents, une grande table a été dressée. La vie collective, intense et foisonnante, a repris ses droits. Une équipe prépare à manger, d’autres s’occupent de la vaisselle. Le tout bercé par des bruits de pelles, de tronçonneuses, de haches et de scies. Les chemins, impraticables suite au passage des forces de l’ordre et des engins de chantier, sont recouverts de branches et de feuillages. (...)
Réparties dans le bocage, les infirmeries tenues par les occupants ont vu passer une centaine de blessés entre vendredi et dimanche. Les plus sérieusement touchés ont été envoyés à La Vache rit, un hangar prêté par un agriculteur devenu haut lieu de la résistance, et transformé à la hâte en mini-hôpital de campagne. Un médecin bénévole y coordonne les opérations. Les grenades de dispersion lancées par les forces de l’ordre aux pieds des manifestants « laissent des fragments dans la peau et font des blessures ouvertes », explique-t-il. (...)
Saluée par l’État-major d’Europe Ecologie-Les Verts, cette commission du dialogue – dont on ignore pour le moment la composition – suscite la méfiance de nombreux opposants, qui y voient une nouvelle tentative de division du mouvement. Tout comme l’annonce par les ministres de l’Agriculture, de l’Écologie et des Transports d’un « renforcement des procédures en faveur de l’environnement ». Le respect de ces procédures devrait retarder le défrichement de la zone, qui aurait dû débuter en janvier. « Nous sommes trop habitués aux coups fourrés », glisse un militant. Ces annonces n’ont en rien entamé la mobilisation. (...)
Des dizaines de manifestations ont eu lieu dans les grandes villes françaises durant le week-end, dont Paris, Lille ou Lyon. Des permanences du PS ont été occupées ou murées en Poitou-Charente ou dans le Jura. Et les comités de soutiens se sont multipliés un peu partout. A Nantes, des milliers de manifestants ont convergé samedi vers la préfecture. Le 25 novembre, des élus s’y sont enchaînés. Ils ont finalement été reçus par le préfet, qui leur a demandé d’intercéder auprès des occupants pour que cessent les barricades et autres blocages des routes. « Nous avons répondu que ce n’était pas à nous de régler les problèmes créés par l’opération César, lancée le 16 octobre dernier dans le bocage », tranche Françoise Verchère. (...)
Dans la ZAD, les occupants tiennent bon. Ils ont été soutenus tout le week-end par des centaines de personnes, qui ont rallié le site à pied et à vélo pour contourner les barrages des forces de l’ordre autour du site de la châtaigneraie. Des citoyens de tous âges, chargés de vivres, de pelles et de morceaux de bois. Beaucoup sont en colère. (...)
« De nouvelles personnes arrivent, sans cesse », décrit une jeune présente pour le week-end. « C’est important pour tenir face à toute cette brutalité. En plus des violences physiques, il y a la violence psychologique. Ils sont venus samedi après 23h, juste pour nous empêcher de dormir. Mais on s’est organisé. On a fait des quarts, installé un grand feu. On était au chaud et au sec, mieux qu’eux en face, qui étaient en train de se geler. » « Ils l’ont, le Larzac ! », lâche Françoise Verchère. « Et c’est eux qui s’embourbent, c’est eux qui sont dans la violence. Le rapport de force est en train de se construire de notre côté. »