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Libération
A Notre-Dame-des-Landes, « on se prépare pour l’hiver »
Article mis en ligne le 30 novembre 2012

Les militants anti-aéroport restent dubitatifs face à la médiation entamée par le gouvernement. Ils demandent le retrait pur et simple du projet et se disent prêts à tenir le siège. Longtemps.

Elle n’en « peut plus » d’entendre les hélices de l’hélicoptère de la gendarmerie, parfois dès 6 heures du matin. Elle en a assez de « couper à travers champs » pour aller acheter son pain, en raison des barrages de gardes mobiles. Et elle supporte de moins en moins de devoir montrer ses papiers d’identité sur les routes alentours à chaque fois qu’elle veut rentrer chez elle. « Ca fait un mois que ça dure », souffle Marie Jarnoux. Cette brune quarantenaire habite à quelques pas du bois de Rohanne, devenu l’épicentre de la bataille que se livrent forces de l’ordre et opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

Mais malgré la fatigue, pas question de lâcher. (...)

La « commission du dialogue », annoncée par Jean-Marc Ayrault samedi dernier, ne l’a guère rassurée. « La plupart des gens ici n’y croient pas, affirme-t-elle. Le gouvernement essaie de nous refaire le coup de l’apaisement. Pourtant, il envoie des flics en civil le lendemain échauffer les esprits sur les barricades. Personne n’est dupe. » Son voisin Claude, qui habite à quelques kilomètres de là, dans le hameau du Liminbout, obtempère : « La commission, je ne vois pas à quoi elle peut servir. L’aéroport, on l’a déjà dit, on n’en veut pas. » Pour les deux voisins, les bases de la discussion sont de toute façon viciées : « Il y a toujours des dizaines de gendarmes dans le coin, alors qu’ils étaient censés se retirer. » (...)

A entendre les riverains, la mobilisation a repris de l’ampleur après les violents affrontements de la semaine dernière. « De nouvelles personnes arrivent. Ça reconstruit, ça avance, souffle Marie. On se prépare pour l’hiver. » Les opposants se concentrent désormais en deux endroits sur les 1 600 hectares du futur (?) aéroport. Le principal point d’accueil se situe à la Vache Rit, un ancien bâtiment agricole reconverti en lieu de vie pour les squatteurs. On y trouve une cantine, une infirmerie, mais aussi une friperie, pour se vêtir chaudement. En face, de l’autre côté de la départementale, une vingtaine de tentes ont poussé dans le champ d’un agriculteur. Un gigantesque chapiteau a également été dressé lundi, de quoi abriter plusieurs dizaines de personnes.

Toute la journée, le défilé est continu. Vers midi, des curieux se pointent. Ils veulent voir à quoi ressemble cette mobilisation dont ils ont entendu parler dans les médias. Une camionnette arrive du Finistère, chargée de matelas. Les habitants du coin apportent de la nourriture, des médicaments... Un grand type à la longue barbe grise, qui se présente comme « faucheur volontaire d’OGM et menuisier » propose son aide pour bâtir de nouveaux bâtiments, notamment à la Châtaigneraie. (...)

« Les pouvoirs publics ont essayé de nous monter les uns contre les autres, en présentant les jeunes des bois comme de dangereux terroristes. Cette stratégie de division n’a pas du tout marché, au contraire. Ça a ressoudé les gens. Et il faut bien reconnaître que les "zadistes" ont contribué à la popularisation de notre mouvement. »

Un avis partagé par Marie Jarnoux. « S’ils n’avaient pas été là, depuis quatre ans pour certains, ça fait longtemps qu’on aurait été mis à la porte, analyse-t-elle. On a beau avoir essayé tous les recours juridiques, bien argumentés, ça n’a jamais fonctionné. Eux, de leur côté, ne se posent pas de questions. Ils construisent des barricades, attirent les regards. Et contrairement à ce qu’on a pu dire, ce ne sont pas des chieurs. Ils ont insufflé de la vie dans le coin, tissé des liens. »

A Notre-Dame-des-Landes, à la permanence d’accueil de l’Acipa, la principale association de riverains opposants, Julien Maillard synthétise la situation : « Les "zadistes" ont la capacité et la volonté d’occuper le terrain. Nous, on veut bien parler aux médias. Ça fait une mayonnaise bien compacte ! » (...)