
Depuis la rentrée, les riverains sont mobilisés pour la fermeture de la SNEM, fournisseur d’Airbus qui produit des déchets dangereux à proximité d’un groupe scolaire.
« Ecole publique, pas chimique », « Pas de chrome pour nos mômes », « Liberté, égalité, contaminé »… Des banderoles et des slogans ont fleuri sur le fronton des écoles Jules-Ferry et Anne-Frank. La rentrée 2017 sent la poudre dans ce quartier de Montreuil (Seine-Saint-Denis), à deux stations de métro de Paris. D’habitude, c’est davantage l’odeur acre qui se dégage de la Société nouvelle d’eugénisation des métaux (SNEM), longtemps appelée l’« usine verte » – comme la couleur de sa tôle – et désignée désormais par le terme moins flatteur d’« usine toxique » par les parents d’élèves et les riverains qui réclament sa fermeture.
Située à une cinquantaine de mètres du groupe scolaire, cette installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est devenue indésirable pour les habitants du quartier depuis qu’un cas de leucémie rare (s’ajoutant à deux autres cas en 15 ans dans la même rue, dont un mortel) a été déclaré chez un élève de CM2 avant l’été, comme l’avait révélé Le Monde. (...)
Depuis lundi 4 septembre, la dizaine de salariés de la SNEM sont au chômage technique. Le portail d’entrée est obstrué par du mastic et de la colle qui empêchent son ouverture. Et sa façade décatie est recouverte de messages qui appellent à la fermeture du site, à sa dépollution et au reclassement des salariés : les trois mots d’ordre des associations de riverains et de parents d’élèves qui font le pied de grue entre l’école et l’usine. « Tant qu’elle continue à fonctionner, il est impossible que les écoles accueillent des enfants », expliquent Nicolas Barrot, le président des Buttes à Morel, qui alerte les pouvoirs publics depuis plus de 10 ans sur la situation de la SNEM, et Antoine Peugeot, le responsable local de la FCPE. Alors plutôt que de s’enchaîner aux portes de l’école, ils bloquent celles de l’usine.
Le Chrome 6 interdit à partir du 21 septembre (...)
Contacté à plusieurs reprises, Mourad Gaham, le président de la SNEM, qui dispose d’un deuxième site à Gellainville (Eure-et-Loir), n’a pas répondu à nos sollicitations. Le 3 août, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de sauvegarde. (...)
Le directeur de l’école Jules-Ferry, Yannick Tilliet, attend avec impatience les résultats de l’étude épidémiologique lancée par l’Agence régionale de santé et des capteurs placés pour analyser l’air dans son établissement. « On manque de données », déplore Yannick Tilliet, qui ignorait même que l’usine fonctionnait encore avant que Nicolas Barrot ne l’alerte.
Arrêté préfectoral de « mise en demeure »
Le président de l’association Les Buttes à Morel espère, lui, que le nouvel arrêté préfectoral pris le 8 août contre la SNEM ne sera pas un nouveau coup d’épée dans l’eau. Le 11 juillet, une visite d’inspection de la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie (Driee), malgré le « grand nettoyage » effectué juste avant par les salariés de l’usine, a relevé plusieurs « non-conformités significatives », notamment dans la gestion des déchets et des rejets atmosphériques. La société est « mise en demeure » sur trois points : stocker de manière optimale les déchets produits afin de prévenir tout risque de pollution avant le 19 septembre, éliminer les déchets au fur et à mesure de leur production sous un délai d’un mois et, surtout, placer aussi loin que possible des habitations les débouchés des systèmes de ventilation et d’aération sous un délai de trois mois. Aujourd’hui, ils donnent directement sous les fenêtres de Nicolas Barrot et d’un centre d’accueil pour autistes.
Si l’une de ces trois obligations n’est pas satisfaite dans le délai imparti, l’arrêté prévoit des sanctions pouvant aller jusqu’à « la fermeture ou la suppression des installations ou la cessation définitive des activités ». (...)