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Rue89 Lyon
A Lyon, un rapport dénonce « un an de répression judiciaire » contre les « gilets jaunes »
Article mis en ligne le 23 novembre 2019

Constituée il y a quelques mois au plus fort du mouvement des « gilets jaunes », une Commission d’enquête populaire contre les violences policières et la répression – composée de nombreux militants, comités et associations – vient de publier un premier rapport pour dénoncer la « répression judiciaire » exercée à l’encontre des manifestants.

Cette synthèse, construite à partir de comptes-rendus d’audiences, de compilations d’articles, et de données regroupées dans une base nationale par le site Bastamag, propose une analyse à la fois qualitative et quantitative centrée sur les jugements rendus par les tribunaux lyonnais un an après le début du mouvement des « gilets jaunes ». (...)

La Commission pointe d’abord le recours systématisé à la procédure de comparution immédiate, actant que « la quasi-totalité des personnes condamnée ont été mises en garde à vue le samedi et déférées en comparution immédiate le lundi ». Selon le rapport, seule une personne sur dix a demandé le renvoi de son affaire afin d’avoir du temps pour préparer sa défense. (...)

Des jugements sur l’intention plus que sur les faits

L’une des plus-values de ce rapport tient à l’étude des chefs d’accusation sur-représentés lors des procès des « gilets jaunes ». La Commission révèle ainsi que dans un tiers des cas étudiés, les manifestants sont poursuivis pour « participation à un groupement en vue de commettre des dégradations ou des violences » (...)

Cette infraction se base surtout sur une intentionnalité d’actes non commis, puisque le juge doit présumer, en fonction du contenu d’un sac, de la proximité avec une personne détentrice d’une arme, ou d’une simple attitude, de la dangerosité ou de l’intention de l’auteur de passer à l’acte. (...)

Mais Lyon ne fait pas figure d’exception. A Montpellier, la Ligue des Droits de l’Homme notait dans un rapport basé sur des audiences du 29 décembre 2018 au 18 mars 2019, que ce chef d’accusation représentait 63% des infractions.

Autre infraction fréquemment poursuivie : celle de « dissimulation du visage ». Si ce n’est pas la plus représentée, il faut rappeler que le délit de dissimulation lors d’une manifestation sur la voie publique a été créé dans le cadre de la loi dite « anticasseurs » ou « antimanifestation » adoptée le 10 avril 2019. Ce délit fait encourir un an de prison et 15 000 euros d’amende. (...)

A noter que les personnes condamnées cumulent généralement plusieurs chefs d’accusation puisque le rapport s’appuie sur 97 infractions pour seulement 57 condamnations. (...)

Sévérité des peines prononcées contre les « gilets jaunes »

Au total, selon les chiffres que nous avons pu obtenir auprès du parquet de Lyon, en un an 303 « gilets jaunes » ont été placés en garde à vue, et 149 personnes ont été déferrées au parquet pour des poursuites judiciaires – soit les affaires considérées comme les plus urgentes. (...)

Zoom sur 57 cas

Dans son rapport, la Commission d’enquête populaire a, quant à elle, étudié 57 condamnations de décembre 2018 à novembre 2019, dont 18 à de la prison ferme, 27 à de la prison avec sursis (8 sont assorties d’une peine de travail d’intérêt général) et 12 autres ayant écopé de peines de travaux d’intérêt général (de 35 à 125 heures) ou d’amendes/dommages et intérêts, pour des montants atteignant 1300 euros.

En moyenne, les peines de prison (fermes et avec sursis confondues) s’élèvent à un peu moins 6 mois. La réponse pénale semble d’autant plus sévère que 4 manifestants sur 5 avaient un casier judiciaire vierge avant cette première condamnation.

De plus, le rapport pointe que depuis janvier, les condamnations sont très souvent assorties d’une interdiction de manifester ou de se rendre à Lyon et à Paris. Celles-ci sont parfois prononcées pour des périodes allant jusqu’à 3 ans. (...)

Interrogé par Rue89Lyon, le parquet de Lyon assume cette politique répressive (...)

Quel traitement des plaintes contre la police ?

Le rapport de la Commission d’enquête populaire effectue pour sa part un parallèle entre la réponse pénale apportée aux infractions commises par les « gilets jaunes », et celle réservée aux forces de l’ordre mises en cause dans des actes de violence (...)

« la continuité d’une violence d’Etat contre les gilets jaunes »

Le rapport se conclut sur une analyse politique, la réponse judiciaire considérée comme « la continuité d’une violence d’Etat » étendue et dépendantes des directives gouvernementales. (...)