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À Bure, un camp festif et féministe contre le nucléaire
Article mis en ligne le 24 août 2021

Plusieurs centaines de personnes ont participé au week-end antinucléaire organisé par le collectif Les Rayonnantes, près de Bure. En plus de manifestations sur des zones concernées par le projet Cigéo, les participantes se sont appliquées à rattacher la lutte contre le nucléaire et la manière de la vivre aux autres oppressions qui structurent la société.

Samedi 21 août, lors de la Criée — un moment où sont lus des messages déposés anonymement dans une petite boîte —, proposition avait été faite de confectionner une banderole de soutien aux exilés et exilées afghans et afghanes. Le lendemain, on retrouvait Sam et Mireille, pinceaux à la main et peinture sur les doigts, en train de la réaliser avec application. Un beau résumé du camp antinucléaire des Rayonnantes, en somme : de l’autogestion, de la débrouille et de l’entraide, une envie de réinscrire le nucléaire dans son système « autoritaire » global, et surtout beaucoup de bienveillance pour les « copaines », d’où qu’ils et elles viennent.

Lancé le 16 août et se tenant jusqu’au 26 août, cet événement se voulant « festif et déterminé » est organisé près de Bure par un collectif actif dans la lutte contre le projet d’enfouissement des déchets nucléaires dans ce petit village du sud de la Meuse. Porté depuis plus de vingt ans par l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (Andra), et combattu depuis autant d’années, ce projet de Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) prévoit pour 2035 l’enfouissement à 500 mètres de profondeur de 85 000 m³ de déchets nucléaires extrêmement dangereux, lesquels resteront radioactifs jusqu’à des centaines de milliers d’années.

Alors que l’Autorité environnementale a rendu il y a quelques mois un avis pointant notamment une prise en charge « pas toujours suffisante » des enjeux environnementaux par l’Andra, laquelle a déposé en août 2020 une demande d’utilité publique pour son projet, les Rayonnantes entendent ainsi montrer que la mobilisation contre Cigéo — et tout ce que ce centre incarne — ne faiblit pas, la population et les élus du coin étant en outre de plus en plus opposés au projet d’après les activistes. (...)

un protocole strict est mis en place pour les journalistes : port d’un brassard permettant de les identifier, interdiction de prendre des photos sur le camp).

Cantine végane et protocole Covid

C’est le site de l’ancienne gare de Luméville-en-Ornois qui a été choisi pour accueillir les participants et participantes (entre 500 et 700 personnes étaient attendues durant le week-end du 21 août selon l’organisation, elles étaient 400 la veille). Tout un symbole : si jamais Cigéo voyait enfin le jour, ce lieu acheté il y a quelques années par des opposants et opposantes au projet, situé sur le tracé de la voie ferrée devant être rénovée pour acheminer les déchets nucléaires en train, fait partie des espaces qui pourraient être expropriés par l’Andra. D’où l’opportunité d’investir ce site durant ces dix jours, de nombreux ateliers et conférences étant prévus en sus de moments à partager tous et toutes ensemble (...)

C’est qu’au-delà du nucléaire, l’idée de ce camp à prix libre est de réfléchir au système « autoritaire » qui le sous-tend et l’alimente, et surtout que tout le monde se sente bien : partout sont disposés des écriteaux rappelant l’importance du consentement, un numéro d’écoute ainsi qu’un protocole en cas d’agression ont été mis en place. L’intention des organisateurs et organisatrices — qui ont conscience du fait que ce camp a été monté essentiellement par des personnes blanches, valides et non issues de milieux précaires (mais, en revanche, « en bonne partie par des personnes trans, non-binaires et meufs cis ») — est ainsi résumée dans le livret d’accueil : « En nous attaquant au nucléaire, il ne s’agit pas seulement de mener une lutte écolo anticapitaliste mais aussi de s’attaquer à tous les systèmes d’oppression qui y sont liés : racisme, colonialisme, cishétéronormativité, classisme, validisme, spécisme (pour ne citer qu’eux). » (...)

Samedi 21 août, des manifestations étaient organisées en parallèle du camp, les Rayonnantes ayant répondu à un appel paru initialement sur Indymedia Nantes. Quatre cortèges — le bleu, le doré, le vert et le violet — se sont élancés en fin de matinée dans les alentours de Bure, le cortège bleu, consistant en une marche festive, étant notamment investi par des habitants et habitantes opposés à Cigéo. Au moment où l’un des cortèges taguait un dépôt de l’Andra, à Gondrecourt, après avoir fait tomber les barrières entourant le lieu, une personne de l’équipe médic a été interpellée par les forces de police, et était toujours en garde à vue dimanche 22 août. Les cortèges violet et vert ont quant à eux été bloqués et gazés par les gendarmes, forçant les manifestants et manifestantes à faire une bonne partie du chemin retour à pied — l’occasion d’admirer les vaches vivant dans le coin mais aussi l’hélicoptère de la gendarmerie tournant de façon incessante dans le ciel.

Le soir, une grande fête était organisée en extérieur (...)