C’est une exception notable dans le paysage technologique mondial, et elle est française. Alors que la plupart des nations européennes peinent à sortir de leur dépendance aux géants américains, l’Hexagone est en train de réussir un pari industriel fou : déployer le cloud souverain à une échelle jamais vue auparavant grâce au nuage open source Nextcloud et à ses outils de productivité.
Ce 9 décembre 2025, lors du Nextcloud Enterprise Day à Paris, les chiffres dévoilés ont pris tout le monde de court. Frank Karlitschek, le fondateur de la solution Nextcloud, n’a pas caché son admiration : la France n’est plus en phase de test, elle est devenue le moteur mondial de la résistance numérique. « Les valeurs européennes ne sont pas négociables, et nous ne pouvons pas nous mettre en position d’être soumis au chantage », a-t-il martelé, rappelant que l’indépendance technique est la seule protection contre les pressions géopolitiques.
L’Éducation nationale : le projet de tous les records
La preuve la plus éclatante vient du ministère de l’Éducation nationale. Loin des effets d’annonce, le projet de « Nuage » souverain est une réalité opérationnelle massive. Benoît Piédallu, chef de projet au ministère, a révélé que la plateforme compte déjà plus de 330 000 utilisateurs quotidiens.
Cela dit, le plus impressionnant reste à venir : l’objectif validé est de monter à 1,2 million d’utilisateurs (enseignants et personnel administratif). C’est, à ce jour, l’un des plus grands déploiements de logiciels libres au monde au sein d’une même organisation. L’objectif est clair : garder la maîtrise des données et des savoirs en interne, sans dépendre d’une licence étrangère révocable.
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Un écosystème français qui passe à l’échelle industrielle
Ce succès ne repose pas uniquement sur la volonté politique, mais sur la maturité technique des acteurs français. L’époque du bricolage est révolue. Malgré le développement de la Suite Numérique pour les agents publics (Ndlr : en collaboration avec l’Allemagne et sur des bases open source), on peut dire que Nextcloud a signé des partenariats stratégiques avec des entreprises comme Smile et renforce ses liens avec Leviia pour garantir des infrastructures capables d’encaisser des millions de connexions simultanées. (...)
Avec 250 millions d’euros d’investissement annoncés pour l’Europe, Nextcloud mise gros sur ce modèle du voisin français. La France entend visiblement prouver qu’il est possible de construire une alternative numérique crédible, performante et souveraine, reléguant au placard l’idée reçue selon laquelle « il n’y a pas d’alternative » aux solutions californiennes (et chinoises).