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Mediapart/Rue89 Strasbourg
Ubérisation de la santé : la plateforme Mediflash visée par une enquête
#santé #ehpad #autoentrepreneurs
Article mis en ligne le 20 octobre 2023
dernière modification le 19 octobre 2023

(...) L’entreprise, qui met en relation des Ehpad avec des aides-soignantes au statut d’auto-entrepreneuse, est ciblée par l’inspection du travail. Alors qu’elle a reçu plus de 450 000 euros d’argent public, elle est soupçonnée de « travail dissimulé ». Et d’avoir évité de payer des millions d’euros de cotisations. (...)

entreprise, fondée en juillet 2020 par trois anciens étudiants du Master Entrepreneurs de la prestigieuse école de commerce HEC.

Sur les réseaux sociaux, la société promet « des missions de renfort valorisantes et très bien rémunérées » dans le métier du soin en établissement de santé ou médico-social, en particulier en Ehpad.

En réalité, tout comme les plateformes de livraison de repas, l’entreprise fait travailler des professionnels en tant qu’indépendants, laissant à leur charge le paiement des cotisations sociales sur leur revenu. Et évitant de payer leurs heures supplémentaires et leurs congés payés, tout en les privant d’une couverture sociale de qualité. En mars 2020, la Cour de cassation a condamné Uber pour avoir imposé le statut d’indépendant à un chauffeur, et Deliveroo a été condamné au pénal et au civil l’an dernier pour le même motif.

Selon l’administration, Mediflash ne respecte pas non plus les règles. Rue89 Strasbourg révèle que la Dreets (direction régionale des entreprises, de l’emploi, du travail et des solidarités, qui chapeaute l’inspection du travail) Grand Est a alerté dans un courrier du 22 septembre les Ehpad clients de Mediflash. Une enquête de l’inspection du travail a en effet révélé une « situation irrégulière au regard des dispositions du Code du travail relatives au travail illégal ». (...)

Fondée en pleine pandémie, la plateforme ne prétend pas seulement offrir flexibilité et revenus attractifs à des soignant·es. Les fondateurs de la plateforme affirment aussi qu’ils répondent à un besoin urgent de nombreux établissements de santé confrontés au manque de médecins, d’infirmières et d’aides-soignantes en particulier.

Aides-soignantes attirées par des « missions très bien rémunérées ! », Ehpad en sous-effectif chronique… Tout concourt au bon fonctionnement de la plateforme Mediflash. (...)

Selon une estimation de l’Urssaf, l’entreprise élude des millions d’euros de cotisations sociales. Pour la Sécurité sociale, le manque à gagner lié à cette ubérisation des aides-soignantes est important : pour une dizaine de maisons de retraite (Ehpad) utilisatrices de la plateforme dans le Grand Est, le non-paiement des cotisations par Mediflash se chiffre à près d’un million d’euros depuis sa création en juillet 2020, d’après une estimation de l’Urssaf.

La plateforme est d’autant plus sous le feu des projecteurs qu’elle a bénéficié d’argent public entre 2021 et 2022. (...)

C’est tout l’effet pervers de l’ubérisation dans le secteur médical et médico-social. Mediflash peut se targuer de répondre à un besoin urgent des Ehpad, en proposant des aides-soignantes auto-entrepreneuses à un tarif plus avantageux que des intérimaires. Mais à plus long terme, l’entreprise contribue au problème qu’elle prétend résoudre. (...)