
La défense annonce l’appel. Le verdict après une procédure record : 86 audiences, 14 accusés, près de deux millions et demi de dossiers analysés. Le Président Pignatone : "Un an et demi d’audience, ce n’est ni marginal ni acquis".
Cinq ans et six mois d’emprisonnement, l’interdiction perpétuelle d’exercer des fonctions publiques et une amende de huit mille euros : telle est la peine infligée au cardinal Giovanni Angelo Becciu par le tribunal du Vatican, à l’issue de la chambre du conseil qui a clos le procès l’impliquant.
"Nous réaffirmons l’innocence du cardinal et nous ferons appel", a immédiatement déclaré l’avocat de Becciu, Fabio Viglione, à la lecture du dispositif. "Nous respectons la sentence mais nous ferons certainement appel", a réaffirmé l’avocat. "Il y a une profonde amertume à constater que l’innocence du cardinal Becciu n’a pas été proclamée par le jugement, alors que toutes les accusations se sont révélées totalement infondées. Les preuves apparues au cours du procès, la genèse des accusations contre le cardinal, qui étaient le résultat d’une machination avérée contre lui, et son innocence, nous permettent d’envisager l’appel avec une confiance intacte", ont déclaré Maria Concetta Marzo et Fabio Viglione, les avocats du cardinal, dans une note. "Bien que le jugement nous attriste profondément, nous avons une solide certitude : le cardinal Becciu, fidèle serviteur du pape et de l’Église, a toujours agi dans l’intérêt de la Secrétairerie d’État et n’a tiré aucun avantage pour lui-même ou pour sa famille", poursuivent les avocats. "Nous respectons la sentence, nous lirons les motivations, mais nous restons certains que tôt ou tard l’absurdité des accusations sera reconnue et donc la vérité : Son Eminence Becciu est innocente".
"Je crois que la démarche a tenu et c’est le plus important pour moi, je crois que dans ces procès il ne faut jamais se réjouir du résultat, un procureur ne peut jamais se réjouir des condamnations, ce qui me satisfait c’est que le travail long et méticuleux a tenu malgré les accusations qui ont été portées contre nous ces dernières années, on nous a dit que nous étions incompétents, ignorants, en réalité le résultat nous donne raison, maintenant je suis serein, je dors tranquillement". C’est ce qu’a déclaré le promoteur de la justice, Alessandro Diddi, lors de la lecture du dispositif au Vatican.
Le tribunal du Vatican a également ordonné la "confiscation pour valeur équivalente des sommes constituant le corpus des crimes contestés pour un total de plus de 166 millions d’euros". Les prévenus ont été condamnés, solidairement, "à payer des dommages et intérêts en faveur des parties civiles, réglés pour un montant total de plus de 200 millions d’euros". Le plus long procès de l’histoire du Vatican
Ainsi s’achève, après près de deux ans et demi, le procès sur la gestion des fonds de la Secrétairerie d’État, qui tourne autour de l’achat et de la vente d’un luxueux hôtel particulier de Sloane Avenue à Londres et de la figure de l’ancien substitut pour les affaires générales de la Secrétairerie d’État, ancien préfet de la Congrégation pour les causes des saints, Giovanni Angelo Becciu, cardinal déchu de ses droits cardinalices par le pape François, puis gracié par le souverain pontife. Il s’agit du processus le plus long et le plus complexe que le Saint-Siège ait jamais connu.
Quatre-vingt-six audiences, dont celle d’aujourd’hui, sur 29 mois (la date d’inculpation est le 3 juillet 2021, le procès a débuté le 27 juillet 2021). Plus de 600 heures passées au tribunal, 69 témoins entendus, 124 563 pages sur papier et dans les dispositifs informatiques et 2 479 062 dossiers analysés déposés par l’accusation, 20 150 pages y compris les pièces jointes déposées par la défense, 48 731 par les parties civiles. Des chiffres énormes qui traduisent l’ampleur et la précision d’un procès monstrueux : des chiffres et des données que le Tribunal du Vatican a voulu dès le début comme le "chiffre" du procès.
Quatorze accusés : dix personnes physiques (Cardinal Becciu, Monseigneur Mauro Carlino, Enrico Craso, Raffaele Mincione, Fabrizio Tirabassi, Cecilia Marogna, Gianluigi Torzi, Nicola Squillace, René Bruelhart, Tommaso Di Ruzza) et quatre sociétés (Logsic Humitarne Dejavnosti, basée en Slovénie, Prestige Family Office Sa, Sogenel Capital Investment et HP Finance LLC).
"Ce procès s’achève aujourd’hui, un an et demi après le début du véritable procès. Il ne me semble pas qu’il s’agisse d’un résultat marginal ni d’une conclusion acquise d’avance", a commenté le président du Tribunal du Vatican, Giuseppe Pignatone, à la fin de son message d’accueil par lequel il a ouvert la 86e et dernière audience. Le Tribunal - les juges a latere, Venerando Marano et Carlo Bonzano - s’est ensuite retiré dans la salle du conseil : le président a donné rendez-vous à 15h45 cet après-midi pour la lecture de la sentence. Le cardinal Angelo Becciu, le plus connu des dix accusés, n’est pas présent dans la salle d’audience.