Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Blast
Marianne, « souverainiste, laïc et républicain », bientôt aux mains de l’extrême-droite ?
#medias #Marianne #extremedroite
Article mis en ligne le 13 juin 2024
dernière modification le 11 juin 2024

CMI, la holding média du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, propriétaire de Marianne, a annoncé le 14 mai avoir engagé des négociations avec le milliardaire Pierre-Edouard Stérin pour la vente du titre. Quasi inconnu dans le monde des médias, Stérin a un profil qui inquiète la rédaction : ultralibéral et catholique réactionnaire, va-t-il, à l’image de Vincent Bolloré, mettre Marianne au service de son combat civilisationnel ? Après la reprise en main du Journal du dimanche par Bolloré cet été, Ia « fachosphère respectable » pourrait s’enrichir d’un deuxième grand titre de la presse écrite.

Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, Marianne, hebdomadaire inclassable et volontiers provocateur créé par le bouillonnant Jean-François Kahn en 1997, occupe une place à part dans la presse française. Une ligne éditoriale comparable à nulle autre, et pour le moins fluctuante, de l’extrême centre pro-européen de son fondateur au souverainisme républicain de l’actuelle directrice de la rédaction, Natacha Polony. Une ligne dont la seule constante, en dehors d’un esprit de contradiction systématique jusqu’à en devenir parfois exaspérant, est la défense intransigeante de la laïcité.

Malgré ces travers, Marianne est un contributeur au débat d’idées et au pluralisme de la presse - pluralisme que l’on retrouve aussi au sein de la rédaction.

Patriotisme souverainiste et laïcisme sans concession, les deux piliers idéologiques du journal risquent d’en prendre un sacré coup après le rachat - si les négociations n’achoppent pas au dernier moment - par le repreneur pressenti : Pierre-Edouard Stérin, un exilé fiscal catho tradi (...)

113 ème fortune de France, avec un patrimoine autour du milliard d’euros, il est considéré comme proche de l’extrême-droite catholique. Une sorte de mini-Bolloré dont il semble partager le combat civilisationnel.

Encore peu connu dans l’univers de la presse, il a néanmoins investi dans des médias réactionnaires. En 2023, il entre au capital de la chaîne Youtube Le crayon, un média « pour les jeunes » qui s’est spécialisé dans l’interview de personnalités d’extrême-droite (par exemples Florian Philippot, Eric Zemmour, l’ex porte-parole de Génération identitaire Thaïs d’Escufon, l’ex syndicaliste policier Bruno Attal), autour des thèmes obsessionnels de l’extrême-droite (immigration, insécurité, islamisme).

Il soutient aussi des projets douteux, tels Canto, une application destinée à apprendre non seulement d’inoffensifs chants folkloriques traditionnels (et paillards), mais aussi des chants réactionnaires, pétainistes et même des traductions de poèmes nazis. (...)

Stérin a aussi co-produit, avec le Canal + de Bolloré et le Puy du Fou de l’inénarrable Philippe de Villiers, le film « Vaincre ou mourir », une ode aux contre-révolutionnaires monarchistes vendéens. (...)

Le bien commun, pour Stérin, c’est par exemple une application destinée à dissuader les femmes d’avorter. Ou destinée à restaurer de vieilles églises. Mais aussi financer une école de journalisme ultra conservatrice (...)

Faut-il s’attendre à une fronde généralisée, comme au Journal du dimanche (le JDD) lorsque les journalistes ont fait plus d’un mois de grève pour protester contre la nomination à la tête de la rédaction du journaliste d’extrême-droite Geoffroy Lejeune ? Rien n’est moins sûr : « certains, une minorité, s’accommoderont très bien de l’arrivée de Stérin », juge sévèrement un confrère, évoquant « un petit clan de zemmouro-compatibles ». Une tendance réactionnaire au sein de la rédaction ? Des journalistes ont gardé en mémoire le passage en 2019-2020, comme collaboratrice du journal, de la géopolitilogue Caroline Galacteros. Elle est ensuite devenue en 2022 conseillère d’Eric Zemmour, lors de la dernière présidentielle. Ou cette une du 13 septembre 2019, au début de l’ère souverainiste de Natacha Polony, avec des femmes voilées, et ce titre : « Quand la République a capitulé ». (...)

Un journal qui déplaît à la macronie (...)

En 2022, la société des journalistes avait accusé le propriétaire Daniel Kretinsky d’avoir changé la une du numéro paru le 21 avril. Sur les visages d’Emmanuel Macron et Marine Le Pen, le titre avait été modifié. « La colère ou le chaos » remplacé par un appel à voter Macron : « malgré la colère, éviter le chaos ». (...)

« Ce n’est pas la situation financière du journal qui pousse Kretinsky à vendre, suggère un journaliste. Il veut vraisemblablement se débarrasser d’un titre qui a irrité la macronie au plus haut point. » (...)