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"Maman, tu dois te battre parce qu’on n’a pas le droit d’empoisonner des enfants" : exposée aux pesticides pendant sa grossesse, une fleuriste se bat pour la mémoire de sa fille morte .
#pesticides #fleuristes #sante
Article mis en ligne le 9 octobre 2024

L’association Phytovictimes appelle elle à manifester devant le tribunal mercredi 9 octobre 2024 "pour soutenir la famille dans son combat", et pour "interpeller les responsables politiques et le grand public sur cette problématique largement ignorée

Le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides reconnaît l’existence d’un lien de causalité entre le décès d’une enfant et l’exposition aux pesticides de sa mère, fleuriste, pendant sa grossesse. L’association Phytovictimes appelle, elle, à manifester devant le tribunal, mercredi. La cellule investigation de Radio France et "Le Monde" révèlent les coulisses de cette affaire.

Laure entre alors en contact avec l’association Phytovictimes(Nouvelle fenêtre), découverte au gré de ses recherches sur internet. Cette association, qui vient en aide aux personnes atteintes de maladies liées aux pesticides, lui conseille de saisir le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP), créé en 2020 par la loi de financement de la sécurité sociale, pour que soit reconnu le lien entre la maladie d’Emmy et son exposition prénatale aux pesticides. En février 2022, après avoir rassemblé toutes les pièces nécessaires, Laure dépose le dossier auprès du Fonds, alors que l’état de santé de la petite fille décline considérablement. Emmy est hospitalisée en détresse respiratoire. Elle décède le 12 mars 2022, à l’âge de 11 ans.

En juillet 2023, un responsable du Fonds téléphone à Laure pour lui annoncer que la commission chargée d’examiner le dossier d’Emmy, composée de chercheurs et de médecins, a rendu sa décision. "Il m’a dit qu’ils avaient reconnu à l’unanimité le lien de causalité entre le décès d’Emmy et mon métier de fleuriste. Ce jour-là, la culpabilité a été énorme. Je me suis dit : comment j’ai pu être aussi naïve ! C’est moi qui ai empoisonné ma fille. Cette enfant que je désirais tant, j’ai occasionné sa perte. J’ai explosé de colère. J’ai dit au médecin : ’Mais c’est un empoisonnement ! Vous vous rendez compte de ce qu’on laisse faire !’ Et il m’a répondu : ‘Je ne peux pas vous dire le contraire’."

Plus de risques pour les fleuristes que les agriculteurs (...)

Des fleurs pas si inoffensives

Laure et François sont reçus par une docteure d’oncologie pédiatrique. "On ne savait même pas ce que ça voulait dire, oncologie. Mais on l’a très vite compris. On nous a dit qu’il fallait s’attendre à un gros cancer. Ma première réaction ça a été de demander aux médecins : ’Comment c’est possible d’avoir un cancer à 4 ans ?’ On nous a juste dit : ’C’est comme ça, c’est la faute à pas de chance’. Mais aujourd’hui je sais que ça n’a rien à avoir avec la malchance".

Quelques jours plus tard, le diagnostic se confirme. Emmy souffre d’une leucémie aiguë lymphoblastique B. Un long combat s’engage. Emmy est régulièrement hospitalisée. Chimiothérapies, opérations, greffes. Emmy perd ses cheveux. Pendant sept ans, elle lutte contre la maladie et contre les douleurs, qui ne la quittent jamais vraiment.

Les périodes de rémission sont de courte durée. À chaque arrêt des traitements, Emmy rechute. (...)

43 pesticides différents

"J’ai commencé à chercher des informations sur les fleurs, sur leur provenance, la manière dont elles avaient été traitées, témoigne encore la mère d’Emmy. Et j’ai découvert une situation consternante. Je me suis rendu compte que sur un bouquet, il pouvait y avoir 43 pesticides différents. J’ai compris que les fleurs étaient des tueuses invisibles."

Pour la jeune femme, c’est un choc. "Comment j’aurais pu imaginer une chose pareille ? Personne ne m’a jamais dit de me laver les mains quand je mangeais, je me grattais le visage ou je me mouchais. Pour moi, quand quelque chose est dangereux, on prévient les gens, on informe ! Les gants n’ont d’ailleurs aucune efficacité en termes de protection." (...)

Laure entre alors en contact avec l’association Phytovictimes(Nouvelle fenêtre), découverte au gré de ses recherches sur internet. Cette association, qui vient en aide aux personnes atteintes de maladies liées aux pesticides, lui conseille de saisir le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP), créé en 2020 par la loi de financement de la sécurité sociale, pour que soit reconnu le lien entre la maladie d’Emmy et son exposition prénatale aux pesticides. En février 2022, après avoir rassemblé toutes les pièces nécessaires, Laure dépose le dossier auprès du Fonds, alors que l’état de santé de la petite fille décline considérablement. Emmy est hospitalisée en détresse respiratoire. Elle décède le 12 mars 2022, à l’âge de 11 ans.

En juillet 2023, un responsable du Fonds téléphone à Laure pour lui annoncer que la commission chargée d’examiner le dossier d’Emmy, composée de chercheurs et de médecins, a rendu sa décision. "Il m’a dit qu’ils avaient reconnu à l’unanimité le lien de causalité entre le décès d’Emmy et mon métier de fleuriste. Ce jour-là, la culpabilité a été énorme. Je me suis dit : comment j’ai pu être aussi naïve ! C’est moi qui ai empoisonné ma fille. Cette enfant que je désirais tant, j’ai occasionné sa perte. J’ai explosé de colère. J’ai dit au médecin : ’Mais c’est un empoisonnement ! Vous vous rendez compte de ce qu’on laisse faire !’ Et il m’a répondu : ‘Je ne peux pas vous dire le contraire’."

Plus de risques pour les fleuristes que les agriculteurs (...)

Un défaut de réglementation en Europe

Contrairement aux fruits et légumes, il n’existe pas pour les fleurs de réglementation européenne permettant de fixer des limites maximales de résidus. Ni d’ailleurs de contrôle de ces résidus, notamment dans les fleurs importées, qui peuvent pourtant contenir des pesticides interdits d’usage en Europe, et ce, en grande quantité. (...)

Un risque avéré pour les travailleurs, mais aucune réglementation pour les protéger. (...)

Interpeller les responsables politiques

Un tabou qui doit cesser, pour Laure Marivain : "C’est simple. Tout le monde sait, mais personne ne fait rien. Et pendant ce temps, il y a des familles qui prennent perpète. Car personne ne nous rendra jamais notre fille. Moi je ne travaille plus au contact des fleurs, mais je suis toujours en lien avec les artisans. Je ne veux surtout pas les pointer du doigt, mais au contraire les protéger".

Avec son mari, Laure a saisi la cour d’appel de Rennes, pour contester la proposition d’indemnisation du FIVP. Car selon l’avocat de la famille, Me François Lafforgue, "le Fonds a retenu le lien entre le décès d’Emmy et sa mère, mais son offre d’indemnisation est limitée aux parents. Cette enfant a souffert considérablement, mais il y a une négation de son préjudice, parce qu’elle est décédée". L’association Phytovictimes appelle elle à manifester devant le tribunal mercredi 9 octobre 2024 "pour soutenir la famille dans son combat", et pour "interpeller les responsables politiques et le grand public sur cette problématique largement ignorée".