
Des géologues représentatifs de la profession ont décidé du sort de l’Anthropocène. Pour eux, l’humanité n’a pas (encore) provoqué de passage à une nouvelle époque géologique. Une décision qui n’emporte pas l’adhésion de tous les scientifiques.
Si l’humanité continue d’imposer sa marque sur Terre, l’idée d’en discuter comme d’une nouvelle époque géologique – l’Anthropocène – semble (pour l’instant) révolue. Le 4 mars dernier, après un mois de débats, une vingtaine de scientifiques ont voté contre l’identification de l’Anthropocène en tant qu’époque géologique succédant à l’Holocène, laquelle a débuté à la fin de la dernière grande glaciation, il y a environ 12 000 ans. (...)
Le vote a été réalisé sur la base d’une proposition présentée par les chercheurs de l’AWG en juillet 2023. Celle-ci portait sur le lieu-candidat pour servir de point de référence nécessaire à la caractérisation de l’Anthropocène. Il s’agissait du lac Crawford, près de Toronto au Canada, dont les couches sédimentaires contiendraient le marqueur de l’entrée dans cette nouvelle époque géologique – la première façonnée par l’humanité. Ces sédiments comportent en effet d’importantes traces de plutonium, seul témoin des essais nucléaires américains effectués au début des années 1950. Une empreinte indélébile à l’échelle géologique dont seule l’humanité est responsable.
Une controverse scientifique à plusieurs facettes (...)
Premièrement, certains chercheurs ne considèrent pas ce marqueur comme étant le seul pouvant traduire de l’entrée dans une nouvelle époque. (...)
D’autres estiment que la relative jeunesse de l’Anthropocène, quel que soit son point de départ, ne peut lui permettre de prétendre à la qualification d’époque (...)
Enfin, il y a ceux qui refusent d’admettre la possibilité d’une nouvelle époque « anthropogénique » et ceux qui vont même jusqu’à remettre la procédure en cause. (...)
La sémantique ne clôt pas le débat
Comme le veut le fonctionnement de l’ICS, une pause de dix ans a été instituée durant laquelle le cas de l’Anthropocène ne pourra malheureusement pas être à nouveau formellement débattu. Cela étant, la communauté des géologues ne refuse en rien l’utilisation « informelle » du terme, que ce soit au sein de leur profession ou des sphères politiques, économiques et citoyennes. « L’Anthropocène demeure un inestimable dénominateur commun de l’impact de l’humanité sur le système Terre. » D’autant que, pendant ce temps, les activités humaines continuent, inlassablement, de franchir les limites planétaires.