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Dans la galaxie des médias d’extrême droite, Frontières occupe une place centrale. Le jeune média identitaire peut compter sur le soutien de l’écosystème pour diffuser ses idées réactionnaires, parfois aux frais du contribuable.
(...) Omerta, Valeurs actuelles (trois numéros), Frontières, Causeur, Front populaire, Furia (deux numéros)… Tous ces magazines proposent une vision réactionnaire de la société et se placent à l’extrême droite du champ politique (même si certains s’en défendent).
L’écosystème des médias d’extrême droite est varié et soutenu par toute une chaîne de production. La chaîne de magasins de presse Relay appartient à Bolloré depuis qu’il a racheté le groupe Lagardère en 2022. Et ce n’est pas un secret que le milliardaire a mis son empire au service des idées conservatrices. Les médias réactionnaires ne se limitent d’ailleurs pas à ceux possédés par Bolloré. Certains se clament haut et fort « indépendants », que ce soit en kiosques (parfois bien mis en avant), sur les plateformes de streaming vidéo ou sur Internet. Par le biais d’aides publiques ou via la défiscalisation, certains sont financés en partie par le contribuable. Focus sur l’un d’entre eux, qui malgré son jeune âge se trouve au cœur de la galaxie médiatique réactionnaire : Frontières.
Un « Mediapart de droite » ?
Le magazine à l’esthétique léchée ne cache pas ses obsessions : l’immigration, l’Islam et la gauche, le tout au prisme du « grand remplacement ». (...)
Depuis juin 2024, Frontières est le nouveau nom de Livre noir. Ce média identitaire, né en 2021 sur YouTube, invitait le gratin de la droite et de l’extrême droite (...)
Mais comment se finance Frontières ? Le magazine est géré par une société, Artefakt, appartenant à Erik Tegnér (qui possède 60 % du capital). Interrogé sur les financements de Frontières par le service CheckNews de Libération, il affirme que 16 % du capital est détenu par de mystérieux « gens issus de la tech, des Français, qui travaillent à Londres ». La manœuvre a été réalisée grâce à Vaudan Nominees United – une entreprise britannique « qui permet à des investisseurs d’entrer collectivement au capital d’une entreprise », précise le journal – et a apporté 700 000 euros à Frontières. (...)
« au travers de la plateforme britannique de levée de fonds, on retrouve trois autres personnes parmi les actionnaires actuels : la directrice artistique du média, Delphine Duvet, le directeur des opérations, Vincent Fline, mais aussi et surtout le député d’extrême droite Gérault Verny, proche d’Éric Zemmour » (...)
À côté de la liste des soi-disant « procédures baillons », bien en valeur, un gros bouton du même rouge vif : « Faire un don via HelloAsso ».
Une association au cœur des médias d’extrême droite
Sur la page de la plateforme HelloAsso [1], qui héberge des projets portés par des associations, la collecte de fonds défiscalisée se fait via une discrète Association de la presse française libre (APFL). Elle a été créée en 2020 par le quotidien d’extrême droite Présent. Le journal, né au début des années 1980 de la volonté de catholiques traditionalistes, a été liquidé en 2022, puis a essayé de se relancer pour devenir un hebdomadaire. Finalement, ce sera un site, Le Nouveau Présent, animé par l’association CLAP, pour Association du club des lecteurs et amis de la presse patriote – sans grande visibilité en ligne. Ses dons sont récoltés via le compte PayPal de Paris Vox, un site de « réinformation » qui a jeté l’éponge fin 2023.
Si elle ne sert plus à Présent, l’APFL joue encore les intermédiaires pour d’autres médias réactionnaires qui souhaitent défiscaliser leurs dons (...)