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Lave-linge : l’arrivée des filtres à microplastiques repoussée... voire enterrée ?
#microplastiques
Article mis en ligne le 25 décembre 2024
dernière modification le 23 décembre 2024

Faute de décret, l’obligation de commercialiser des lave-linge équipés d’un filtre à microplastiques au 1er janvier ne sera pas respectée. Ce dispositif est considéré comme complexe et pas des plus pertinents.

Ils devaient équiper les lave-linge à compter du 1er janvier. Mais les filtres à microplastiques ne seront pas intégrés à tous les appareils neufs, contrairement à ce que prévoyait la loi Antigaspillage pour une économie circulaire (Agec), promulguée en février 2020.

(...) Les vêtements issus à plus de 60 % de la pétrochimie

Polyester, acrylique, élasthanne, nylon, viscose... Nos vêtements sont issus à plus de 60 % de la pétrochimie. En imposant des filtres sur les lave-linge, l’objectif est de réduire la pollution liée à la dégradation de ces fibres synthétiques lors du lavage. Selon une étude publiée en 2019 par des chercheurs espagnols, chaque mètre carré d’étoffe synthétique rejetterait de 30 000 à 465 000 microfibres lors des cinq premiers lavages.

Or, ces microplastiques s’accumulent dans l’eau, l’air, le sol, mais aussi dans le corps humain. Outre les dommages causés aux écosystèmes, les scientifiques alertent sur des corrélations inquiétantes entre leur présence et l’altération de certains organes (poumon, intestins, cerveau...), voire l’apparition de maladies. (...)

« Ce n’était pas du tout la solution »

La pertinence de rendre les filtres obligatoires est également remise en cause. Cet équipement « ne peut régler à lui seul la question de la pollution aux microplastiques », jugeait l’Igedd. Parce que les études manquent encore pour évaluer la capacité de captation des filtres et le niveau réel d’émission des fibres synthétiques ; que les équipements existants ne permettent pas de retenir les fibres les plus fines ; que les microparticules plastiques sont surtout dispersées lors de la fabrication des vêtements, bien avant le lavage chez les particuliers ; que l’efficacité du filtre, intégré à la machine ou externe (ajouté à la sortie d’évacuation), repose d’abord sur un nettoyage scrupuleux et régulier par l’utilisateur.

Ces dispositifs seraient-ils finalement une mauvaise idée ? Même Brune Poirson, qui a porté la loi Agec le pense, rapporte Contexte, média spécialisé dans les institutions et les politiques publiques. « Avec le recul, on s’aperçoit que ce n’était pas du tout la solution », a estimé l’ancienne secrétaire d’État à l’Écologie (2017-2020), lors d’une table ronde organisée par le cabinet d’avocats Veil Jourde le 12 décembre. Certes, les filtres peuvent réduire une partie des microplastiques rejetés dans les eaux, mais d’autres mesures devraient être mises en œuvre en amont, estiment les acteurs du secteur.

Privilégier l’écoconception des vêtements

D’abord, les fibres se dégradent davantage lors de cycles à température élevée ou avec certains détergents plus agressifs. Certains industriels ont d’ailleurs développé des cycles « microplastiques ». (...)

Autre solution préconisée par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dans son rapport « Pollution plastique : une bombe à retardement ? », publié en 2020 : le lavage des vêtements, à l’échelle industrielle, avant leur mise sur le marché, pour limiter la libération des microfibres lors des lessives ultérieures.

L’Igedd recommande pour sa part « d’axer prioritairement les efforts sur l’écoconception des étoffes et des produits textiles » : réduire la part des fibres synthétiques et augmenter celle des naturelles, utiliser des fils biodégradables, opter pour des techniques de fabrication plus vertueuses… Par exemple, le lavage du tissu polaire libérerait « dix fois plus de fibres que d’autres textiles », note l’Inspection générale, en raison de la méthode utilisée pour sa conception.