
Une proposition de loi transpartisane pour la régulation des installations des médecins provoque la colère. Le contre-feu du gouvernement a alimenté la colère.
Après les annonces de François Bayrou sur les déserts médicaux, nouvelle montée de température dans la Santé. Les médecins se mobilisent, entre grève dès ce lundi 28 avril et manifestation mardi 29 avril, contre une proposition de loi de régulation d’installation de leur profession. (...)
Le mécontentement vient d’une proposition de loi transpartisane, à l’initiative de Guillaume Garot (PS), dont l’article phare a été adopté début avril par l’Assemblée nationale, l’examen du reste du texte étant prévu début mai.
Ce texte, qui prône une régulation des installations en faveur des déserts médicaux, provoque la colère des médecins libéraux, étudiants en médecine, internes et jeunes médecins, pour qui ce projet « mettra à mal l’attractivité de la médecine libérale, aujourd’hui le premier rempart du système de santé ».
Le gouvernement est hostile au texte mais ne convainc pas non plus
Lucas Poittevin, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), a lancé le 16 avril un appel à « une grève nationale intersyndicale illimitée à partir du 28 avril ».
Le gouvernement, hostile au projet Garot, a allumé un contre-feu vendredi, en présentant comme une alternative à la « fin de la liberté d’installation » un « plan de lutte contre les déserts médicaux ». Mais la mesure phare mise en avant par François Bayrou – imposer jusqu’à deux jours par mois de temps de consultation aux médecins dans les zones prioritaires du territoire – a aussi braqué les praticiens.
« Si c’est une obligation individuelle, je pense que ça va renforcer la grève », prédit même auprès de l’AFP Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux (SML). Pour le député Garot, le principe de consultation avancée deux jours par mois ne répondra pas « à l’ampleur du problème : les zones les moins bien dotées sont rarement à proximité géographique des zones les mieux dotées ». (...)
Le Syndicat des Médecins Généralistes (MG France, majoritaire chez les libéraux) recommande juste d’aller « manifester auprès des jeunes médecins, parce que ce sont eux qui sont visés par le projet Garot », comme le dit à l’AFP sa présidente Agnès Giannotti.
Soutiens aux jeunes internes
« Nous, on a donné comme consigne lundi, mardi, mercredi d’arrêter les activités. Dans la mesure du possible. Parce qu’on a quand même des contraintes majeures avec des chirurgies programmées », brosse Philippe Cuq. « Je crois qu’il faut, pour faire bouger les politiques, créer un risque. Un risque sanitaire. Il n’y a que ça qui va faire écouter les politiques », avance-t-il. (...)
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– (France3)
"Dans l’enfer de l’hôpital", le livre d’un interne en médecine sur la situation de l’hôpital public
Léonard Corti en troisième année d’internat au sein de l’AP-HP et président du Syndicat des internes des hôpitaux de Paris à la Salpetrière alerte sur la situation à l’AP-HP. (...)
Jeune interne à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière entre 2019 et 2021, Léonard Corti a été confronté à de nombreux dysfonctionnements pendant cette période. Il en a tiré un livre : "Dans l’enfer de l’hôpital", aux éditions Robert Laffont. Il alerte les pouvoirs publics sur la souffrance des internes et le malaise de l’hôpital public.
Comment sont traités les internes dans les hôpitaux publics ?
J’étais interne depuis seulement quelques mois, je me suis retrouvé seul à gérer un patient en train de mourir. En pleine nuit, tout seul, sans médecin juste avec le personnel de service, il a fallu que je prenne des décisions, que j’endosse des responsabilités auxquelles je n’étais pas réellement préparé. (...)
En discutant avec mes collègues, je me suis rendu compte que je n’étais pas la première personne qui était confrontée à ce genre de situation. Une situation qui n’est pas anodine. (...)
Le non-respect de nos droits a des conséquences sur notre santé mentale. Les chiffres sont édifiants. Il y a trois fois plus de chances de se suicider lorsqu’on est interne par rapport à quelqu’un d’autre. Presque deux tiers des internes ont été victimes de troubles anxieux lors de l’année qui vient de s’écouler et 6 % des internes ont fait des tentatives de suicide. Le fait qu’on travaille beaucoup et qu’on ne reconnaisse pas ce travail participe à ce malaise profond. (...)
Les directeurs subissent la pression de la rigueur budgétaire qu’on applique à l’hôpital depuis des années et les soignants regrettent d’être des exécutants dans une structure où il n’y a plus de place à la concertation. Il faut voir aussi l’organisation de carrière. On demande aux médecins d’être à la fois manager, chercheurs, cliniciens. On demande aux médecins de savoir tout faire et le risque c’est qu’on finisse par tout faire mal.
En sortie de crise sanitaire, ce que je souhaitais aussi c’est attirer l’attention sur la question de la médecine préventive. (...)
Le Covid-19 a conduit en réanimation des patients qui étaient déjà malades, il faut savoir que tous les patients que j’ai pris en charge en réa étaient à 100 % atteints d’une pathologie chronique.