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L’UE reconnait "une situation difficile" dans ses partenariats avec les pays africains pour lutter contre l’immigration irrégulière
#UE #immigration #Tunisie #Maroc #Mauritanie #Libye #migrants
Article mis en ligne le 24 mai 2024
dernière modification le 23 mai 2024

La Commission européenne a reconnu mardi "une situation difficile" après la publication d’une enquête journalistique révélant que les fonds de l’UE alloués à des pays africains – Tunisie, Maroc et Mauritanie – servaient en partie à financer des refoulements dans le désert pour empêcher les exilés d’atteindre l’Europe. Des pratiques contraires au droit international.

Face aux accusations de complicité sur les violations des droits de l’Homme dans certains pays d’Afrique, la Commission européenne a réagi mardi 21 mai. "Parfois, la situation est difficile dans nos pays partenaires" mais ils "restent des États souverains et contrôlent leurs forces nationales", a affirmé une des porte-parole de l’institution, Ana Pisonero. Son homologue Éric Mamer, interrogé lors d’un point presse quotidien, a lui aussi partagé la même analyse : "C’est une situation qui est difficile, qui est mouvante et sur laquelle nous allons continuer à travailler".

Une enquête, publiée le même jour par des médias internationaux dont Le Monde et le Washington Post avec le collectif de journalistes Lighthouse Reports, révèle comment "l’Europe soutient, finance et participe directement à des opérations clandestines menées dans les pays d’Afrique du Nord pour abandonner chaque année des dizaines de milliers de personnes noires dans le désert ou dans des régions reculées afin de les empêcher de venir dans l’Union européenne (UE)".

Arrestations arbitraires

L’enquête signale que des réfugiés et migrants au Maroc, en Mauritanie et en Tunisie sont "appréhendés en raison de la couleur de leur peau, emmenés dans des bus et conduits au milieu de nulle part, souvent dans des zones désertes et arides", sans eau ni nourriture.

Certains sont emmenés vers des zones frontalières où ils sont "vendus par les autorités à des trafiquants d’êtres humains et à des gangs qui les torturent contre rançon".

Depuis plusieurs années, InfoMigrants a publié des dizaines d’articles et de témoignages de migrants racontant les arrestations arbitraires dans les rues ou dans les maisons des Noirs dans ces pays, mais aussi en Libye et en Algérie, et les refoulements dans des zones désertiques.

À l’été 2023, la rédaction avait récolté plusieurs récits d’exilés relatant les interpellations dans les rues de Sfax, dans le centre-est de la Tunisie, et les expulsions dans le désert, à la frontière avec l’Algérie et la Libye – des pratiques qui n’ont jamais cessé depuis et qui se sont mêmes accentuées ces derniers jours.

En fin d’année, InfoMigrants avait révélé que des exilés étaient discrètement transmis par des forces tunisiennes à des Libyens, et transférés dans les prisons du pays. (...)

Des fonds de l’UE utilisés pour refouler des migrants dans le désert

Selon l’enquête de Lighthouse Reports publiée mardi, ce "système de déplacement de masse (…) fonctionne notamment grâce à l’argent, les véhicules, l’équipement, le renseignement et les forces de sécurité fournis par l’UE et les pays européens".

Le quotidien Le Monde écrit qu’en Tunisie les "pick-up Nissan utilisés par la police pour arrêter les migrants correspondent à des modèles livrés par l’Italie et l’Allemagne entre 2017 et 2023".

Au Maroc, les "4x4 Toyota Land Cruiser, utilisés lors d’arrestations dont les images ont été diffusées sur les réseaux sociaux (…) correspondent aux modèles achetés par l’Espagne, puis par l’Europe" dans le cadre d’un accord entre les deux pays. (...)

En Mauritanie enfin, l’UE finance "la reconstruction de deux centres de rétention. Ceux-là mêmes où des migrants sont enfermés avant d’être envoyés dans le désert, acheminés dans des pick-up Toyota Hilux en tout point similaires à ceux livrés par l’Espagne en 2019", peut-on lire dans l’enquête.

"Des exemples, parmi d’autres, qui démontrent que ces opérations, contraires à la Convention européenne des droits de l’Homme, bénéficient du soutien financier de l’UE et de ses États membres", insistent les journalistes. (...)

D’après Lighthouse Reports, les instances de l’UE ont parfaitement connaissance d’une partie de ces arrestations arbitraires, contraires au droit international. (...) Sans pour autant mettre fin à son partenariat.