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Mediapart
L’économie de la Cisjordanie paye le prix fort de la guerre à Gaza
#israel #palestine #Hamas #Cisjordanie #Gaza
Article mis en ligne le 25 février 2024
dernière modification le 23 février 2024

Permis de travail suspendus, checkpoints renforcés, touristes volatilisés, taxes non versées : plus de quatre mois après le début de la guerre entre Israël et le Hamas dans l’enclave palestinienne, les territoires occupés subissent eux aussi une crise économique sans précédent.

Étranglée par les checkpoints et les attaques des colons, régulièrement battue par les opérations militaires israéliennes, Jénine fait face à une pénurie criante de consommateurs, en particulier des Palestiniens citoyens d’Israël, habitués à venir ici pour faire leurs achats à moindre frais.
« 65 % de l’économie de Jénine dépend de ces visiteurs extérieurs qui n’ont désormais plus accès à nous à cause de la fermeture de la “frontière”. Ça représente un manque à gagner énorme. Et à cause des violences, même les habitants des environs n’osent plus venir parce qu’ils ont peur. En tout, les volumes des ventes ont diminué de 80 %, révèle Mohammed Kamil, le directeur général de la chambre de commerce et d’industrie de Jénine. La situation était déjà très compliquée avant, mais depuis le 7 octobre nous traversons la pire crise économique de l’histoire de Jénine. » (...)
« Moi, lui et lui, on est tous sans travail », souffle Mujahed Jehada, 28 ans, qui doit faire face, comme 30 000 autres travailleurs locaux, à la suspension du permis qui lui permettait d’aller offrir ses services en Israël ou dans les colonies. Des permis spéciaux que les travailleurs de Cisjordanie se sont vu immédiatement retirer à la suite des massacres perpétrés par le Hamas, qui ont coûté la vie à quelque 1 200 personnes côté israélien. (...)
« Je n’ai désormais plus le droit d’aller travailler en Israël et c’est impossible de trouver du travail ici, assure ce diplômé en comptabilité de l’université arabe américaine de Jénine. Je suis au chômage depuis le début de la guerre et les gens qui m’ont fait un prêt commencent à m’appeler pour récupérer leur argent. » (...)
En tout, ce sont près de 200 000 travailleurs de Cisjordanie qui se sont vu retirer leur permis après le 7 octobre. Une mesure de sécurité, d’après l’État hébreu. Une « punition collective », selon Raja Khalidi, directeur de l’Institut de recherche sur la politique économique de la Palestine (MAS).
« La suspension des permis, les consommateurs palestiniens d’Israël et de Jérusalem qui ne viennent plus, les incursions de l’armée à Jénine, Tulkarem et Naplouse qui sont autant de “mini-Gaza”, le renforcement des checkpoints, un climat d’affaires plein d’incertitudes : toutes ces vagues, mois après mois, ont créé une situation désastreuse, résume cet économiste de renom. À cela, il faut aussi ajouter les revenus liés aux taxes et impôts qu’Israël a confisqués. » (...)
« C’est difficile de comprendre à quoi jouent les Israéliens. L’effondrement de l’économie palestinienne engendrerait fatalement un effondrement sécuritaire, ce qui n’est pas dans leur intérêt », souligne un diplomate européen en poste à Jérusalem. (...)
À la mairie, on précise que 5 000 travailleurs locaux dépendent d’une industrie touristique aujourd’hui moribonde. Ce à quoi il faut ajouter les 17 000 qui se sont retrouvés au chômage suite à la suspension de leurs permis, et 14 000 à 15 000 fonctionnaires et pensionnés qui, jusqu’à présent, ne touchent qu’une partie de leur salaire en attendant qu’Israël débloque les fonds destinés à l’Autorité palestinienne. (...)