
Plus de 70 organisations ont publié une lettre ouverte destinée au Comité d’organisation des Jeux olympiques, aux athlètes et aux fédérations, à moins de neuf mois des JO en France. Les humanitaires y dénoncent "le nettoyage social" en cours en région parisienne pour laisser "propres" les rues et cacher les migrants aux futurs touristes. Entretien avec Paul Alauzy, coordinateur de la "mission exilés" de l’ONG Médecins du monde.
InfoMigrants : Que se passe-t-il dans les rues de la capitale pour l
es personnes à la rue, à l’approche des Jeux olympiques (JO) ?
Paul Alauzy : On dénonce le nettoyage social en cours dans les rues de Paris et d’Ile-de-France.
On sait très bien que pendant les JO, les caméras du monde entier seront tournées vers Paris. Pendant cette période, les autorités veulent donc cacher les sans-abris, les migrants, les mendiants, les usagers de drogue… qui vivent dans la capitale. Il faut laisser les rues ‘propres’, et le gouvernement prépare déjà le terrain.
Plusieurs squats majeurs ont été démantelés. C’est par exemple cas de celui d’Unibéton, qui était le plus grand d’Ile-de-France. Il a été fermé pour laisser place au futur village olympique. (...)
Le gouvernement ne veut pas que les touristes aperçoivent des sans-papiers ou des SDF dormant dehors et étendant leur linge dans les rues de Paris. On craint un arsenal répressif complet afin de faire partir ces personnes des lieux fréquentés par les étrangers : on s’attend à des arrêtés anti mendicité dans les gares ou pour interdire les distributions alimentaires… (...)
Cette logique suit la politique de maltraitance mise en place par les autorités envers les personnes à la rue. (...)
On maltraite les mal-logés, on criminalise ceux qui occupent des bâtiments vides, on harcèle les sans-papiers déboutés de l’asile et qui n’ont d’autres choix que de dormir dans les rues de la capitale. (...)
Les mesures mises en place ne sont jamais faites dans une logique d’accueil, d’inclusion et d’accès aux soins.
On constate par ailleurs une opposition totale entre ces politiques et la communication de la France sur les valeurs olympiques, la France ville-refuge ou ville d’accueil. Dans les faits, on observe tout le contraire.
L’État communique sur les JO les plus "inclusifs" de l’Histoire, chiche ? (...)
Si certains cochent les bonnes cases, comme les primo-arrivants et les non dublinés, ils seront pris en charge. Mais quid des autres ? Les déboutés de l’asile et les sans-papiers ? Ceux-là vont finir à la rue après trois semaines d’hébergement, dans des villes qu’ils ne connaissent pas et où les associations sont moins nombreuses qu’à Paris.
C’est souvent le même schéma qui se répète : les autorités locales se retrouvent débordées, et les exilés reviennent par leurs propres moyens à Paris.
Si le but de ces SAS est d’invisibiliser les exilés, cela fonctionne. Si en revanche, l’objectif est de mieux prendre en charge les gens, alors c’est un échec. (...)
On demande un lieu d’accueil en Ile-de-France avec un accès pour les associations, sur le même modèle que ce qui a été fait pour l’accueil des Ukrainiens, mais cette fois pour toutes les nationalités. On souhaite un plan de prise en charge pour les personnes exclues et à la rue pendant et après les JO.