
Où es-tu humanité ? Les attaques israéliennes aux Casques Bleus d’interposition entre les territoires occupés par Israël et le Liban constituent le déni méprisant, par la force militaire, de l’autorité et de l’existence même de l’ONU, l’organisation politico-institutionnelle majeure de la communauté internationale.
C’est la première fois dans l’histoire de l’ONU. Inadmissible. La condamnation claire, forte, non négociable à prononcer de la part de l’ONU ne doit plus tarder. Elle doit être au nom de l’Humanité, et faire en sorte que l’inadmissible ne puisse plus se produire à l’avenir. Car ce n’est plus « seulement » un non-respect du droit international (ONU, Cour Internationale de Justice, Cour pénale internationale…) et, donc, un déni violent de l’existence de la communauté internationale. C’est désormais le déni de l’humanité elle-même, bafouée, piétinée, sacrifiée sur l’autel des objectifs de domination et de spoliation de la vie des peuples et de la nature, sous l’alibi insensé et pervers d’assurer sa propre sécurité.
Les limites à l’inadmissible ont été balayées
Les agissements des fanatiques dogmatiques à la tête de l’État d’Israël ne sont pas les seules formes de transgression des limites (certains utilisent le concept de « frontières » pour exprimer la même idée) qui marquent le monde en cette troisième décennie du XXIe siècle. Depuis la fin des années ’80, d’abord doucement puis avec une violence grandissante, les habitants de la Terre subissent une volonté délibérée des groupes sociaux dominants de ne plus respecter les limites établies par la communauté internationale. Les limites concernent tous les domaines. La communauté y a fait recours pour protéger le vivre ensemble, la justice, la suprématie des droits universels collectifs, les biens communs essentiels pour la vie, la sauvegarde et le soin de la nature, la liberté et la dignité des peuples, l’esprit de la fraternité planétaire.
Le dépassement des frontières planétaires
Six des neuf « frontières planétaires » définissant l’espace de sécurité pour la vie des habitants de la Terre, selon les travaux du groupe international de recherche piloté par le Stockholm Resilience Center, ont été dépassées. (...)
Les prétentions de l’industrie chimique, des maîtres de l’IA et des seigneurs de la guerre (...)
Le cas des limites transgressées par la finance globale
La liberté de fixer ses propres règles a été aussi revendiquée par la finance privée globale depuis la crise financière internationale de 1971-73 et les chocs pétroliers de 1977-78.
La finance s’est emparée de la liberté par elle-même. Elle lui a été aussi octroyée par les pouvoirs publics. (...)
Dans un système démocratique, la souveraineté appartient au peuple. La désertion de l’État est inadmissible. L’État ne peut pas démissionner de ses responsabilités et obligations liées à des fonctions relevant de l’autorité publique, non susceptibles d’être transférées/ déléguées à des sujets privés.
La finance a fait, en outre, sauter une autre limite fondamentale concernant la conception de la nature en faisant approuver par la COP15-Biodiversité de l’ONU (Montréal, décembre 2022) le principe de considérer/réduire tout élément du monde naturel à un capital naturel – un avoir financier (...)
La réduire à une catégorie de l’économie capitaliste de marché – un capital productif/un avoir financier- constitue un outrage intolérable à la valeur de la nature. Sa valeur ne saurait être réduite à la valeur donnée par le prix de marché. Une telle réification de la nature par la finance se traduit par une mutation absurde de l’essence de la nature et de son immense valeur pour la vie. A cet égard, le peuple Maori en Nouvelle Zélande a une civilisation bien avancée par rapport à la conception « occidentale » de la vie et du monde, lorsqu’il affirme avec conviction et solennité « Le fleuve c’est nous », Il le fait pour défendre l’intégrité vitale du fleuve, Wanganui, contre les dévastations prédatrices provoquées par une économie qui a réduit la nature à une ressource/capital productif/financier au service de la croissance des intérêts économiques des plus puissants. (...)
En en ce qui concerne la liberté octroyée à la finance par les pouvoirs publics, on doit faire référence, entre autres, à la décision prise par l’Union Européenne en juin 1998 lors de la création de la Banque Centrale Européenne. Les gouvernements des États membres, avec le soutien de tous les Parlements nationaux, ont attribué à la BCE le statut d’une organisation juridique propre indépendante de toute autre institution politique européenne et nationale. Or, la BCE a toujours affirmé qu’elle ne fixait pas la valeur du capital, le taux d’intérêt à payer pour que les acteurs économiques aient accès à l’argent, cette capacité appartenant au marché. La BCE intervient uniquement pour éventuellement « corriger » le taux d’intérêt du marché en vue de garantir une meilleure stabilité monétaire et soutenir la croissance économique. Le cas de la BCE confirme que l’une des fonctions régaliennes de l’État a été confiée au marché, l’indépendance politique de la BCE étant un instrument solide pour promouvoir l’indépendance politique du marché dans le domaine monétaire et financier.
Pas de limites à l’appropriation de la connaissance et à son utilisation (...)
La législation sur les brevets autorise l’octroi d’un droit exclusif de propriété privée à but lucratif pour une période de 18 à 20 ans (susceptible de prolongement) sur les nouvelles connaissances acquises dans le domaine des organismes vivants, y compris les éléments et les processus cognitifs (info-communication). Or, les brevets représentent le transfert de la responsabilité publique de la régulation du pouvoir de traitement et d’usage de la vie à des sujets privés. Un transfert insensé.
On a pris la mesure de l’importance cruciale des brevets pour les droits universels à la santé et pour une politique mondiale de la santé à l’occasion de la pandémie COVID-19. Rappelons que 4 milliards de personnes au monde n ‘ont encore aucune couverture de base en matière de santé. Eh bien, les vaccins anti Covid étaient, évidemment – et restent – sous la propriété des grands groupes de l’industrie pharmaceutique occidentale. Certains pays du Sud (Afrique du Sud, Inde…) ont demandé de suspendre provisoirement l’application des règles sur la propriété intellectuelle concernant les vaccins pour permettre aux populations du Sud d’accéder aux vaccins par eux- mêmes. Une suspension prévue, d’ailleurs, par les articles 31-33 du traité constitutif de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). (4)
Les grandes entreprises pharmaceutiques mondiales occidentales avec le soutien inconditionné des leurs États (États-Unis et Royaume-Uni en tête) ont rejeté avec force et cynisme la suspension provisoire. Les populations pauvres du monde du Sud ont dû attendre deux ans, à savoir le temps que les populations des pays riches aient été vaccinées, avant de pouvoir accéder à l’achat des vaccins. (...)
Les citoyens doivent cesser de croire aux thèses et aux conceptions des dominants et prendre conscience qu’ils doivent défendre bec et ongle les règles et les limites qui visent à délimiter les champs du possible et leurs évolutions dans le but de sauvegarder et promouvoir les droits de et à la vie de tous, pour tous. Les limites sauvent et protègent la vie, la liberté et la dignité des êtres vivants. (6)
La liberté sans limites ou selon les règles autodéterminées par les dominants est une liberté de l‘injustice, de la prédation, de la guerre. La liberté des puissants opprime et tue.
Ce qui précède montre un fait majeur. Aujourd’hui l’enjeu crucial concerne l’existence et la liberté de l’humanité et son devenir. J’ai l’impression que nous sommes en train de passer de l’ère de la libération « nationale » des peuples colonisés, mal ou bien réalisée, à l’ère de la libération de l’humanité contre la domination globale et planétaire des nouvelles oligarchies mondiales, dont l’objectif primordial est de maintenir leur puissance et leur domination avec la complicité de leurs États. IL est urgent que les citoyens expriment leur dissidence et leur résistance de manière à libérer l’humanité du système actuel d’oppression et d’injustice