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La vie des idées/À propos de : Axel Honneth, Le souverain laborieux. Une théorie normative du travail, Gallimard
Démocratiser le travail, écologiser la démocratie
#democratie #travail #ecologie #productivisme
Article mis en ligne le 16 juillet 2025
dernière modification le 14 juillet 2025

Peut-on penser une démocratie du travail sans penser aux conditions mêmes de son existence ? Toute critique sociale qui ignore la crise écologique risque de renforcer un modèle productiviste déjà à bout de souffle.

Les paradigmes critiques du travail : de l’aliénation à la démocratie

Depuis sa théorie de la reconnaissance sociale, Axel Honneth poursuit son ambition d’articuler théorie critique et normativité sociale à partir d’un objet central de nos sociétés modernes, et pourtant oublié de la théorie de la démocratie politique selon lui : le travail salarié. Loin de se cantonner à une critique du capitalisme ou à une sociologie de l’organisation, A. Honneth propose dans ce dernier ouvrage une généalogie normative des manières d’interpréter et de contester les formes historiques du travail salarié. Pour ce faire, il distingue trois grandes traditions critiques qui structurent l’imaginaire normatif du travail contemporain quant à la bonne manière, ou la manière adaptée, d’organiser le travail social : l’aliénation, l’autonomie et la démocratie (p. 19-40). (...)

Les préjudices démocratiques comme entraves à la citoyenneté

Cette relecture du travail à l’aune de la démocratie n’est pas qu’un vœu pieux. En effet, après avoir identifié les cinq dimensions qui montrent combien le travail peut avoir une forte influence sur « les chances de participer aux pratiques de la formation publiques de la volonté » (p. 55) des travailleurs, A. Honneth propose une analyse pragmatique des conditions empêchant cette réalisation démocratique, qu’il conceptualise sous la forme de cinq préjudices (p. 196), que l’on pourrait qualifier de démocratiques : économique, temporel, psychique, social et moral. Ceux-ci ne relèvent pas simplement de la souffrance au travail, mais constituent de véritables atteintes structurelles aux conditions de possibilité de la citoyenneté effective. (...)

Cette typologie constitue une contribution précieuse à la théorie critique contemporaine, en ce qu’elle relie pathologies du travail et délitement démocratique, sans pour autant céder aux simplismes ni à une nostalgie du fordisme. Toutefois, ce cadre normatif, aussi puissant et foisonnant soit-il, reste marqué par une forme d’anthropocentrisme politique. C’est précisément sur ce point qu’une discussion paraît devoir s’ouvrir.

Vers une démocratie écologique du travail ?

Si l’on peut souscrire à l’ambition de la démocratisation du travail d’A. Honneth, il convient de relever une zone d’ombre majeure dans son argumentaire : l’absence des enjeux écologiques. Cette lacune n’est pas marginale puisqu’elle touche à la fois la finalité du travail et les conditions mêmes de sa soutenabilité dans l’Anthropocène. (...)