
En octobre 2022, la société Imerys annonçait vouloir exploiter un gisement de lithium d’importance mondiale dans le centre de la France. Un an après, le débat s’ouvre entre riverains, élus locaux et la compagnie minière – un scénario voué à se répéter tant les projets similaires se multiplient en France.
(...) Au fil des mois, la mine de Beauvoir dans l’Allier est devenu un enjeu majeur pour la transition écologique française et européenne.
L’Union européenne cherche en effet à garantir un accès durable en matières premières critiques pour la transition écologique, en encourageant l’extraction d’au moins 10 % de ses besoins sur son propre sol à l’horizon 2030, tel qu’énoncé dans sa loi sur les matières premières critiques (Critical raw materials act, CRMA, en anglais) en cours d’étude.
Face à l’explosion de la demande en lithium pour équiper les véhicules électriques notamment, les projets d’exploitations minières se multiplient en France. D’ailleurs, le pays prépare un « grand inventaire » minier pour sonder les ressources de son sous-sol. (...)
Les perspectives économiques sont d’autant plus encourageantes que les prospections ont permis d’identifier un gisement d’environ 1 million de tonnes de lithium, exploitable sur 25 ans.
Depuis, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a apporté son soutien au projet (...)
L’objectif est en effet d’équiper quelques 700 000 véhicules par an grâce à la production de 34 000 tonnes par an, selon les chiffres d’Imerys.
Le financement nécessaire au projet est colossal (...)
L’emplacement de ces deux aménagements sont toujours à l’étude (...)
À terme, l’entreprise prévoit la création de près de 1 000 emplois directs et indirects, suscitant l’espoir de toute une région marquée par la désindustrialisation et les faibles opportunités économiques. Cette manne pousse d’ailleurs les communes limitrophes du projet à entrer en concurrence pour attirer les futures usines du groupe. (...)
Il y aura néanmoins des contraintes environnementales à respecter.
Le site de Beauvoir, à la frontière entre les départements de l’Allier et du Puy-de-Dôme, se situe en effet au cœur d’une zone riche en biodiversité, le massif de la Bosse.
La carrière elle-même, aujourd’hui désafectée, se situe dans la forêt remarquable des Colettes, une des plus belles hêtraies d’Europe, avec une superficie de 2 000 hectares. Site classé Natura 2000, la réserve accueille de nombreuses espèces qui figurent sur la liste rouge des espèces menacées. (...)
Les associations environnementales ainsi que les élus écologistes de la région Auvergne-Rhône-Alpes se sont rapidement saisis de la question, organisant pour ces derniers une visite de la mine, un mois après les annonces de lancement du projet. (...)
« De nombreux points sont encore flous, notamment celui crucial de l’eau. Nous serons très vigilants sur ce dernier », explique à Euractiv Anne Babian-Lhermet, élue écologiste à la Région pour le département de l’Allier.
D’autant que le département fait face depuis l’été dernier à un stress hydrique inhabituel pour la région. (...)
En filigrane se pose un enjeu crucial : celui de l’acceptabilité sociétale des projets industriels liés à la transition écologique. (...)
Malgré l’organisation de cinq réunions publiques entre novembre et décembre 2022, des associations de riverains se sont formées, déterminées à obtenir l’abandon du projet.
Le collectif stopmines03 et l’association « Préservons la forêt des Colettes », fers de lance de cette opposition locale, n’ont de cesse de communiquer sur les risques de ce projet minier. (...)
« Devons-nous assumer le saccage de territoires entiers et des populations qui y habitent pour permettre la construction de Tesla ou autres SUV électriques pour le plaisir des plus riches et le bien-être de l’industrie automobile ? » peut-on lire sur des prospectus distribués par ces deux associations lors de la fête la Confédération paysanne, organisée le 5 novembre, à Cournon, dans le Puy-de-Dôme. (...)
L’opposition ne se cantonne pas uniquement aux associations. Le conseil municipal de Saint-Bonnet-de-Rochefort a voté contre tout projet de réaménagement de la gare de sa commune pour acheminer le lithium.
Pour éviter la confrontation et répondre aux obligations de concertation et d’échanges avec les populations impactées par le projet, Imerys s’est saisi le 13 juillet de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). (...)