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Mediapart
Canicule : comme prévu, la France est en surchauffe
#rechauffementclimatique #France #canicule
Article mis en ligne le 14 août 2024
dernière modification le 12 août 2024

Avec quarante départements en vigilance orange ce lundi, une deuxième vague de chaleur frappe actuellement l’Hexagone. Pour les scientifiques, cet épisode caniculaire est caractéristique du changement climatique qui continue de s’intensifier.

C’est la deuxième vague de chaleur de l’année. Après une flambée des températures qui a touché le pourtour méditerranéen français le 9 août, puis un mercure qui a atteint hier les 40 °C sur le littoral aquitain, ce sont quarante départements qui ont été placés sous vigilance orange canicule par Météo-France lundi 12 août. Des températures maximales de 36 °C à 38 °C sont attendues en Île-de-France, en Centre-Val-de-Loire ou encore en Bourgogne.

L’épisode caniculaire que subit le pays a été qualifié par Météo-France de « non exceptionnel mais assez durable, nécessitant une vigilance particulière notamment pour les personnes sensibles ou exposées ». (...)

« La France va faire face à une nouvelle vague de chaleur avec un pic bref mais très intense et qui s’accompagne d’un risque incendie élevé pour certains départements, indique pour sa part Sophie Szopa, directrice de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), autrice et principale coordonnatrice pour le sixième rapport du Giec. Ces événements sont tout à fait caractéristiques du réchauffement climatique intégralement dû aux activités humaines qui rend les vagues de chaleur plus fréquentes et plus intenses. »
Une planète en ébullition

Alors que le changement climatique augmente à « un rythme sans précédent », la planète vient d’enregistrer treize records mensuels consécutifs de température à la surface de la Terre. Le globe a battu les 23 juillet le record de la journée la plus chaude sur Terre jamais mesurée.

Enfin, l’Antarctique, actuellement en plein hiver austral, a, toujours en juillet, connu des températures au sol en moyenne de 10 °C au dessus de la normale de saison – et de 28 °C certains jours.

« À un climat réchauffé à + 1 °C comme actuellement, il y a une chance sur cinquante pour que des épisodes caniculaires pareils arrivent. Une chance sur quatre à + 1,5 °C de réchauffement et une chance sur deux à + 2 °C, précise Magali Reghezza-Zitt. Ça veut dire que ça n’arrivera pas tous les ans mais que ces épisodes seront rentrés dans la normalité. »

Or, la France est tout particulièrement vulnérable aux dérèglements climatiques. L’Europe se réchauffe en effet deux fois plus vite que le reste du monde. Et Paris est la capitale européenne au risque de surmortalité le plus élevé en cas de vague de chaleur.

Quant à la Méditerranée, elle est une des régions mondiales les plus impactées par le réchauffement, comme l’a souligné le dernier rapport du Giec. (...)

Les plus vulnérables en première ligne

Dans son sixième rapport annuel publié en juin dernier, le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant placé auprès des services du premier ministre, a souligné que les inégalités d’exposition face au dérèglement du climat « risquent de s’aggraver », notamment pour les enfants et les ménages les plus précaires. C’est que si l’inaction climatique perdure, les enfants nés en 2020 subiront sept fois plus de vagues de chaleur qu’une personne née en 1960.

Par ailleurs, sur les périodes estivales de 2014 à 2022, les chaleurs extrêmes ont déjà causé la mort de près de 33 000 personnes dans notre pays, d’après Santé publique France.

« Une inquiétude qui commence à poindre est l’augmentation des épisodes de nuits tropicales, qui peut être dangereux pour les patients à risque puisque leurs organismes ne peuvent plus se reposer la nuit, poursuit Magali Reghezza-Zitt. L’autre inquiétude, et on commence à avoir des signaux faibles d’alerte sur la côte méditerranéenne, c’est la chaleur humide. Ce sont des conditions climatiques qui empêchent la peau de transpirer, et ça réchauffe le corps. »

Face à cet épisode caniculaire, le docteur Grégory Emery, directeur général de la Santé, a déclaré auprès de Mediapart miser sur la territorialisation de la prévention (...)

Le ministère de la santé incite tout particulièrement à inscrire les personnes fragiles sur les registres communaux, afin qu’elles soient surveillées de près par les services sociaux municipaux en cas de chaleur extrême. (...)

« Il y a un enjeu de responsabilité individuelle face à ces risques, avertit le docteur Grégory Emery. On doit s’attendre à faire face dans les prochaines années à des vagues de chaleur plus tôt et plus tard, avant ou après l’été. »
Déficit d’adaptation

Si l’État français doit gérer l’urgence durant ces épisodes caniculaires et continuer à diminuer les émissions de gaz à effet de serre du pays, le Haut Conseil pour le climat a également rappelé dans son rapport de juin 2024 que les impacts du chaos climatique croissent plus vite que les moyens mis en œuvre par le gouvernement pour s’y adapter. (...)

Prévu initialement pour cet été, ce document-cadre climatique, pourtant techniquement prêt, ne sera publié, contexte politique oblige, que vers la fin de l’année. Quant à Christophe Béchu, sa communication sur les réseaux sociaux s’est quasiment entièrement focalisée sur les médailles des Français au Jeux olympiques, malgré les deux canicules.

En attendant, selon l’observatoire européen du changement climatique Copernicus, il est déjà « tout à fait possible » que 2024 soit l’année la plus chaude jamais enregistrée.