Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Reporterre
Bolloré bafoue les droits humains en Afrique, selon l’un de ses actionnaires
#Bolloré #Afrique #exploitation #ethique
Article mis en ligne le 9 août 2024
dernière modification le 7 août 2024

Salaires insuffisants, violences... Le puissant Norwegian Government Pension Fund Global donne deux ans au groupe français Bolloré pour améliorer le sort des travailleurs de la Société camerounaise des palmeraies, sa filiale indirecte.

C’est une alerte qui a dû sonner de manière désagréable au sein de Bolloré. Quelques semaines après que le Parquet national financier (PNF) a requis un procès contre l’ancien PDG du groupe, Vincent Bolloré, pour une affaire de corruption présumée en Guinée et au Togo, le conseil d’éthique de l’un de ses actionnaires, le puissant Norwegian Government Pension Fund Global (GPFG), a produit un rapport le mettant en cause dans de « graves » violations des droits de l’Homme au Cameroun.

Ce document, daté de mars 2024 mais rendu public fin juin, est venu rappeler que le groupe français reste actif en Afrique bien qu’il ait vendu, en 2022, sa filiale dédiée à la logistique sur le continent. Outre son rôle, important, dans le secteur de la télévision payante, il est copropriétaire, avec le Belge Hubert Fabri, de la Société financière des caoutchoucs (Socfin), une holding belgo-luxembourgeoise ayant des intérêts dans l’agro-industrie en Afrique de l’Ouest et du Centre à travers une autre entité, Socfinaf. (...)

Viols et harcèlement sexuel (...)

Depuis une quinzaine d’années, la Socapalm fait l’objet de nombreuses dénonciations et plaintes sur des aspects sociaux, fonciers et environnementaux, de la part de ses travailleurs, de riverains et d’organisations de la société civile. Interpellé à plusieurs reprises, le groupe Bolloré a toujours répondu qu’il n’était pas impliqué (...)

Mais un collectif d’habitants, qui accuse la Socapalm de les empêcher d’accéder à des terres et de polluer les eaux environnantes, a réussi, à l’issue d’une procédure judiciaire menée en France, à lui faire admettre en 2023 qu’il partageait bien avec Hubert Fabri le contrôle de Socfin. (...)

Cette fois, c’est donc l’un de ses propres actionnaires qui s’est rendu sur le terrain, et pas n’importe lequel : le GPFG est le plus grand fonds souverain du monde, géré par la Banque centrale de la Norvège, la Norges Bank. (...)

À l’issue de son enquête, le conseil d’éthique du GPFG, chargé d’évaluer les pratiques des entreprises dans lesquelles le fonds investit, a donné raison aux employés et riverains de la Socapalm. Dans son rapport, il dit en effet avoir identifié de « nombreuses, et dans certains cas, graves violations du droit du travail ». (...)

L’instance norvégienne a non seulement « enquêté sur place pour voir la réalité des plaintes des communautés locales, mais [elle] a aussi pris une position forte face au discours du groupe Bolloré, qui prétendait qu’il n’est qu’un actionnaire minoritaire », relève cette association basée en Espagne.

Les membres du conseil d’éthique estiment que la multinationale française a une part de responsabilité (...)

Le cas de la Socapalm n’est pas isolé, soulignent-ils aussi. De nombreux abus sont signalés depuis plusieurs années dans d’autres plantations de la Socfin, rappellent-ils. Au Liberia, en particulier, les problèmes s’accumulent (...)

Quelques semaines plus tôt, des riverains et des organisations de la société civile avaient diffusé une lettre ouverte pour partager leur inquiétude à propos du projet qu’a Socfin de vendre ses parts dans SRC, et pour demander à la multinationale de ne rien entreprendre tant que les dommages sociaux, environnementaux, culturels et économiques subis par les populations locales ne seraient pas réparés. (...)

Le fait que les manquements observés à la Socapalm aient été réédités ailleurs a amené le conseil d’éthique du GPFG à penser qu’ils sont le résultat d’un « comportement systématique » de la part de Socfin. Étant donné que « ni la Compagnie de l’Odet ni Bolloré n’est conscient du risque d’être impliqués dans des violations graves des droits de l’Homme dans leurs plantations » et qu’il n’a trouvé « aucune indication que Bolloré respecte dans ce cas sa politique en matière de droits de l’Homme », il conclut qu’il y a un « risque inacceptable » que les deux entreprises perpétuent des « violations graves et systématiques des droits de l’Homme ». Son avis face à ce constat tient en une phrase : « Le conseil d’éthique recommande d’exclure du GPFG les sociétés Compagnie de l’Odet SE et Bolloré SE. »