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Bâtiments vides, spéculation… Le business des entrepôts logistiques
#speculation #immobilier #entrepôts #betonnage #biodiversite
Article mis en ligne le 15 février 2024
dernière modification le 13 février 2024

Avant que les terres ne deviennent plus rares et chères, le marché des entrepôts logistiques s’accélère à coups de spéculation. Ces énormes bâtiments vides gâchent la vie, et la vue, des habitants.

« Entrepôts logistiques : un empire en expansion ».
• Une enquête diffusée en partenariat avec l’émission La Terre au carré, de Mathieu Vidard, sur France Inter.

(...) . « Matin et soir, on entend le bruit des effaroucheurs pour éloigner les oiseaux de l’entrepôt, se plaint le retraité chauffagiste. J’ai connu des champs de blé moissonnés à la place de tout ça. Il y avait des bécasses, des lapins, des perdreaux et des faisans qui venaient manger dans la cour. Maintenant, il n’y a plus rien. »

Une sortie d’autoroute, une terre agricole reclassée en zone d’activités économiques dans les documents d’urbanisme, et quelques années plus tard, une gigantesque boîte de stockage ou de distribution, puis deux, puis trois… Le scénario vécu par Joël à Mer, dans le Loir-et-Cher, se répète dans les communes périphériques et rurales de France, sous l’effet d’un étalement de l’immobilier logistique, des plateformes qui stockent ou redistribuent des marchandises, via des quais de chargement et déchargement de camions. (...)

Comment cette bourgade d’un peu plus de 6 200 habitants s’est-elle retrouvée à consacrer une si grande part de son territoire à la logistique ? À l’origine, il y a un « traumatisme économique » lié à la fermeture de l’usine de matelas Epeda, en 1999, avec ses quelque 300 emplois. « L’urgence était de recréer de l’activité économique et de l’emploi », raconte Hélène Miniot, responsable du développement économique de la communauté de communes Beauce Val de Loire. (...)

La demande d’implantations logistiques, elle, ne faiblissant pas, les logisticiens ont investi les lieux (...)

Prochainement, si les recours de l’association À bas le béton sont rejetés, les entreprises d’immobilier logistique Etche Log, Panhard, Concerto et Scannell Properties ajouteront environ 270 000 m2 d’entrepôts sur la zone et 70 hectares d’emprise de terrain. (...)

Pour combien d’emplois ? « On ne sait pas. Les opérateurs construisent les bâtiments, et ensuite les louent à des clients » (...)

Le maire de Mer, Vincent Robin, s’inquiète de son côté du retard que pourraient prendre les projets d’entrepôts à cause des recours engagés par l’association À bas le béton. Ses craintes se résument en trois lettres : ZAN pour zéro artificialisation nette, l’obligation, fixée par la loi Climat et Résilience en 2021, de diviser par deux le rythme d’artificialisation des terres d’ici à 2030 et de l’annuler totalement en 2050. La traduction de ces trajectoires dans les documents locaux d’urbanisme et de planification est imminente. (...)

« Ils font des réserves et spéculent sur les terres qui vont devenir de plus en plus rares et chères », affirme Noé Petit. C’est également ce que pense Charles Fournier, député Les Écologistes d’Indre-et-Loire. Son rapport sur les incidences du déploiement des grands entrepôts logistiques, paru en décembre 2023, note « des effets spéculatifs » sur certains de ces pôles secondaires « disposant d’un foncier plus abondant et moins cher ». Le marché du blanc, soit de l’immobilier logistique développé sans utilisateur, a connu « un record », avec 650 000 m² livrés au cours de la seule année 2021 et vingt programmes en chantier, soulignait le média spécialisé VoxLog, citant Arthur Loyd Logistique.

Le sujet des effets spéculatifs de la compétition autour de l’acquisition de foncier pour la logistique est tabou dans le secteur. (...)

« C’est moche, c’est vide et ça n’apporte que des désagréments » (...)

Les « pôles secondaires » deviennent plus attractifs pour les développeurs dans un contexte d’anticipation de la rareté du foncier et de hausse des loyers. (...)

Des communes rendues d’autant plus attractives que la desserte routière s’améliore, puisque 90 % des entrepôts logistiques sont uniquement reliés à la route, et ne disposent pas d’installations permettant un passage à un autre mode de transport. (...)

Aucun collectif local d’opposants ne s’est constitué. Le sentiment qui domine est l’attente et l’incertitude quant aux 1 000 emplois annoncés sur le parc logistique. Le premier bâtiment construit demeure désespérément vide depuis son inauguration en mars 2023, et la communauté de communes dit ne pas connaître le nom d’éventuels clients. (...)