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Armées : Ces militaires qui craignent un gouvernement d’extrême droite
#electionslegislatives #extremedroite #armée
Article mis en ligne le 23 juin 2024
dernière modification le 21 juin 2024

Traditionnellement peu bavards sur les sujets politiques, une vingtaine de militaires de l’armée française ont accepté de confier à Blast leurs doutes. Une parole rare, qui illustre un malaise profond à l’idée d’un gouvernement d’extrême droite. A une semaine du premier tour des législatives anticipées, quelques voix tremblent dans les rangs. Ukraine, relations avec la Russie de Poutine, renversement des alliances, discriminations, maintien de l’ordre... Les sujets d’inquiétude sont nombreux.

(...) parler politique oui, à condition de ne pas militer. Souvent, les hommes et les femmes qui servent sous les drapeaux préfèrent éviter d’aborder ces sujets, notamment parce qu’ils maîtrisent mal les limites de leur propre liberté d’expression.

Inquiétudes dans les troupes

Depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, le 9 juin dernier, les militaires sont comme les autres citoyens français : ils s’interrogent sur l’avenir proche et la perspective d’un hémicycle dominé par le Rassemblement national (le RN), voire la possible nomination d’un Premier ministre issu des rangs du parti de Marine Le Pen. (...)

« Je suis mal à l’aise à l’idée de servir sous un gouvernement RN », confesse Stéphane, officier supérieur dans un état-major régional. « Le scénario RN me fait assez frémir, confie en écho Franck, autre officier supérieur, breveté de l’École de guerre. Le glissement autoritaire m’inquiète. Et d’être dans une institution qui pourrait porter ce glissement aussi, voire encore plus. » (...)

Les armées françaises ne sont pas un ensemble homogène : avec 240 000 personnes servant sous l’uniforme, aux parcours et aux cultures différentes, impossible de résumer des tendances et pratiques qui varient d’une unité à l’autre, selon les métiers, les affectations ou les grades. Il y a ceux qui préfèrent éviter de parler politique (la grande majorité), pour ne pas prendre le risque de plomber l’ambiance. Et puis il y a les grandes gueules, qui adorent afficher leurs opinions, sans se soucier de ce que peuvent en penser les autres.

Le prosélytisme des tradis (...)

Il s’agit principalement d’officiers, plus nombreux dans l’armée de terre et dans la marine nationale, affichant clairement leurs pratiques religieuses et leurs idées très à droite (...)

Rien, pourtant, malgré l’écho amplificateur qu’ils rencontrent dans les médias aujourd’hui, ne permet d’affirmer qu’ils sont plus nombreux que dans n’importe quel autre corps de métier ou dans la population générale. (...)

Dans le flot des témoignages recueillis par Blast, trois grands sujets (et inquiétudes) reviennent avec insistance : la question d’un éventuel renversement d’alliances militaires, une possible désinhibition des franges les plus radicales et enfin l’assignation des soldats à des missions de police. Autant de questions qui en nourrissent une autre, lancinante : rester ou non fidèle au drapeau d’un pays qui aurait basculé à l’extrême ? (...)

Préserver mon honneur d’officier

Ce dilemme est aujourd’hui clairement posé. « Cela remet en cause le poste dans lequel je suis actuellement », constate Joris. S’il a derrière lui « 20 ans d’armée » et exerce « dans une spécialité extrêmement déficitaire », ce militaire ne s’en cache pas : « si la tendance se confirmait à la présidentielle j’envisage une démission de l’institution, afin de rester en accord avec mes convictions profondes et préserver mon honneur d’officier. Mon rôle est de défendre les valeurs de la République, pas de servir une idéologie contraire à ces valeurs. »