
En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, la région la plus peuplée d’Allemagne, un rapport pointe le manque de transparence lors des opérations d’expulsion dans les aéroports, que les observateurs ne peuvent suivre qu’en partie.
Mert Sayim travaille pour la Diakonie, une organisation caritative affiliée à l’Église protestante allemande. Il y conseille les personnes réfugiées et participe à leur intégration dans le pays. Mert Sayim se rend aussi régulièrement dans les aéroports du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (l’Allemagne est composée de 16 Etats fédérés appelés Länder), en particulier dans celui de Düsseldorf.
Plus de 2 800 personnes ont été expulsés depuis l’aéroport de la capitale régionale en 2024, soit parce que leur demande d’asile avait été rejetée ou parce qu’elles sont considérées comme une menace pour la sécurité publique après avoir commis une infraction pénale.
En 2024, plus de 20 000 personnes ont été expulsées d’Allemagne.
Mert Sayim suit de près ces procédures d’expulsion et documente tout comportement répréhensible dans le traitement des personnes expulsées. Depuis 2022, ces renvois sont passées d’un peu moins de 13 000 à plus de 20 000 par an.
Ce chiffre a encore augmenté en 2025. Selon le ministère fédéral de l’Intérieur, 12 000 personnes ont déjà été expulsées au cours du premier semestre.
Expulsé après une opération lourde
Lors de la présentation du nouveau rapport annuel de la Diakonie, Mert Sayim explique avoir "notamment observé l’expulsion d’un enfant qui venait de subir une opération du cœur. Et cela s’est produit sans le suivi médical prévu, alors qu’un rendez-vous pour un examen avait déjà été programmé". Mert Sayim appelle à davantage de sensibilité et de flexibilité dans des cas aussi précaires. (...)
Le rapport de la Diakonie estime que "lors de l’expulsion de personnes malades, chaque cas individuel doit être évalué et suivi afin de déterminer si la personne concernée a effectivement accès aux soins médicaux nécessaires dans le pays de destination. Il est important de vérifier si la personne peut de façon autonome obtenir, financer et accéder au traitement". Le rapport en déduit qu’une expulsion doit être suspendue en cas de risques importants pour la santé.
Or, les renvois sont rarement mis en pause pour des raisons de santé. En revanche, il arrive que des pilotes de ligne refusent de décoller en cas de comportement agressif pour garantir la sécurité des passagers.
"Une expulsion ne doit pas être menée à n’importe quel prix", affirme la commissaire Andrea Hoffmeister, du service de presse de la police fédérale à Sankt Augustin. Elle insiste sur les formations reçues par les agents chargés de mener les expulsions et qu’il existe des salles spéciales aménagées à l’aéroport pour les familles et les enfants.
En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, la police et la Diakonie travaillent depuis longtemps ensemble.
Un appel à plus de transparence (...)
L’asile de l’église plutôt que l’expulsion
Le pasteur Rafael Nikodemus, qui surveille également les opérations d’expulsions avec la Diakonie, a une conception différente de la confiance. Selon lui, "la transparence dans ce domaine profite à toutes les institutions impliquées dans le processus d’expulsion. Il est important que les organisations gouvernementales et non gouvernementales partagent une vision commune de ce qui est acceptable d’un point de vue humanitaire".
Le pasteur Rafael Nikodemus constate également les effets de la pression politique sur la question migratoire dans les lieux où les personnes menacées d’expulsion trouvent souvent un ultime refuge : les églises. En 2024, il y a eu 329 nouveaux cas d’asile religieux en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, explique Nikodemus, qui note que "c’était moins que les années précédentes".