 
	Pour la première fois de son histoire, le parti de Marine Le Pen a fait adopter un de ses textes à l’Assemblée. Une proposition de résolution pour dénoncer l’accord de 1968 avec l’Algérie, votée avec les voix de la droite Les Républicains et Horizons, mais aussi grâce à l’absentéisme de la plupart des députés macronistes.
Et soudain, l’extrême droite jubile. Les député·es du Rassemblement national (RN) et leurs alliés se sont levés en hurlant, jeudi 30 octobre, dans l’enceinte de l’Assemblée nationale, pour célébrer une victoire symbolique et un tournant majeur de l’histoire parlementaire. Grâce aux voix des groupes Horizons et de la droite Les Républicains (LR), mais aussi grâce à l’absence de nombreux députés macronistes, l’Assemblée a adopté à une voix près la proposition de résolution du RN visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968.
Pour la première fois depuis son retour en force au Palais-Bourbon en 2022, le groupe présidé par Marine Le Pen a donc réussi à faire adopter un de ses textes proposé à l’occasion de sa journée de niche parlementaire. Cette victoire, savourée par la triple candidate à la présidentielle qui a quitté l’hémicycle sourire aux lèvres en applaudissant, a déclenché de puissantes invectives venues des rangs d’une gauche manifestement sous le choc.
« La honte, la honte ! », ont répété les député·es de l’ancien Nouveau Front populaire (NFP), pointant les bancs clairsemés du groupe Ensemble pour la République (EPR), dont seuls 30 membres sur 92 étaient présents pour s’opposer à la proposition du parti d’extrême droite. La voix du vice-président du RN Sébastien Chenu, qui présidait la séance mais a tout de même voté – contrairement à l’usage habituel –, a été décisive.
Dans un moment de confusion mêlée de sidération, le député Alexis Corbière, membre du groupe écologiste, a tenté un rappel au règlement pour dénoncer les attaques ayant visé son camp au cours des débats. Mais sa voix était presque couverte par les cris de satisfaction de ses adversaires frontistes. (...)
Un peu plus tôt, Guillaume Bigot, le rapporteur du texte pour le RN, avait en effet convoqué « le parti de l’étranger » pour qualifier la gauche de « parti de l’Algérie », la mettant sur le même plan que « les fascistes et les collabos qui étaient pour l’Allemagne dans les années 1930 ». Une expression « qui vient notamment au XIXe siècle des courants d’extrême droite antirépublicains », a dénoncé l’ancien professeur d’histoire qu’est Alexis Corbière.
Soutien de la droite, gêne des macronistes
« C’est une journée historique pour le Rassemblement national », a jubilé Marine Le Pen face aux journalistes à l’issue du vote, savourant une grande première : jusqu’à présent, jamais le parti d’extrême droite n’avait réussi à faire adopter un de ses textes proposés en niche parlementaire. Fidèle à sa stratégie habituelle, le RN avait une nouvelle fois choisi de porter des sujets soutenus par d’autres.
Depuis des années, la proposition de dénoncer l’accord de 1968, qui organise les conditions d’emploi, de séjour et de circulation des ressortissant·es algérien·nes en France, est revendiquée par une part de plus en plus large du spectre politique.
D’Édouard Philippe à Gabriel Attal, en passant par l’ancien ministre de l’intérieur et patron du parti LR, Bruno Retailleau, tous ont appelé à la dénonciation de cet accord, renforcés par la remise, il y a quelques jours, d’un rapport parlementaire. Rédigé par les députés macronistes Charles Rodwell et Mathieu Lefebvre – devenu entretemps ministre –, le document chiffre à 2 milliards d’euros les coûts de ces dispositions pour l’État. Et appelle, lui aussi, à y mettre fin.
L’examen de cette proposition de résolution, à la portée symbolique majeure, a donné lieu à de vives passes d’armes dans un hémicycle surchauffé. (...)
Peu présent·es dans l’hémicycle, les macronistes se sont livré·es à quelques contorsions pour annoncer leur opposition à une proposition pourtant défendue par leur chef de file, préférant instruire le procès en incompétence du RN. (...)
En coulisses, d’autres député·es macronistes se sont dit révolté·es par le manque de mobilisation de leurs propres collègues. « On ne déserte jamais face au RN. C’est la victoire de la honte ! », fustige l’élu de Moselle Ludovic Mendès, soulignant que face à l’extrême droite, il aurait fallu « tenir la tranchée ».
Auteur du rapport, mais absent de l’hémicycle, Charles Rodwell avait dénoncé la veille, dans un communiqué, la menace d’un « déferlement migratoire sur la France » si la proposition du RN était validée telle quelle.
Un changement de ligne Place Beauvau
Représentant le gouvernement en l’absence du ministre des affaires étrangères, le ministre chargé des relations avec le Parlement, Laurent Panifous, a tenu la même ligne, préférant plaider pour une renégociation de cet accord plutôt qu’une dénonciation. (...)
Depuis le remplacement de Bruno Retailleau Place Beauvau, qui avait fait de ce dossier sa marotte, l’exécutif a changé de discours sur la question. Au rapport de force souhaité par le patron de LR avec l’Algérie, son successeur au ministère de l’intérieur, Laurent Nuñez, a opposé une forme d’apaisement afin de tenter de renouer des relations franco-algériennes. « Il y a cet accord, il fonctionne, il n’est pas complètement parfait, je vous le concède, mais pour l’instant [sa dénonciation] n’est pas à l’ordre du jour », avait-il expliqué sur CNews le 22 octobre.
Unanimement opposé·es à ce texte, les parlementaires de gauche se sont attelé·es tout au long des débats à ramener le RN à ses origines « anti-algériennes » et « xénophobes ». (...)
Voir aussi : 
(sur Invidious, pas ou peu de pistage)
Sabrina SEBAIHI (3’19)
🇫🇷🇩🇿 Le RN a fait adopter, à 185 voix contre 184, la dénonciation de l’accord de 1968 entre la #France et l’#Algérie.
La chasse aux algériens continue en France. Honte aux députés macronistes qui par leur absence ont offert cette victoire.
Honte aux députés Horizons et à leur chef Édouard Philippe qui pensent prospérer electoralement sur le lit du racisme. Pour eux aussi des lendemains sans gloire et sans honneur.
Un véritable crachat à la figure de la République.
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