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A bord du navire humanitaire Life support : les témoignages insoutenables d’Erythréens passés par la Libye
#migrants #Libye #LifeSupport
Article mis en ligne le 14 avril 2024
dernière modification le 12 avril 2024

Monté à bord du navire de recherche et de sauvetage italien Life Support, InfoMigrants s’est entretenu avec des migrants érythréens tout juste secourus. Leurs témoignages retracent des parcours d’exil douloureux qui évoquent autant les maltraitances des passeurs que les violences des gardiens dans les geôles libyennes.

(...) Payer pour sortir de prison

A pied et en voiture, Mehretab parcourt le Soudan. Il finit par arriver en Libye dans la ville côtière de Sabratha, connue pour être une plaque tournante de trafics, située à environ une heure de route de Tripoli. Il y reste neuf mois, puis se lance dans sa première tentative de traversée.

Mais il est intercepté par les garde-côtes libyens et envoyé dans une prison. Là-bas, raconte-t-il, les gardiens battent les migrants qui doivent survivre avec un seul repas par jour.

Après une semaine, il réussit à rassembler l’argent nécessaire pour payer sa caution, soit environ 700 dollars, grâce à ses parents et des connaissances vivant dans dans différentes régions en Libye.

"J’ai eu beaucoup de chance, mais mes amis sont restés, certains un mois, d’autres deux mois. Si vous ne pouvez pas payer, vous ne pouvez pas sortir", explique-t-il.

Lors de sa deuxième tentative, il parvient de justesse à échapper aux garde-côtes libyens qui le surprennent avant d’embarquer. Lors de son troisième essai, il est à nouveau arrêté et renvoyé en prison pendant un mois, en plein hiver. Mehretab se souvient du froid "insupportable". Cette-fois, il lui faut trouver 1 000 dollars pour retrouver la liberté. Pour ces tentatives ratées et ses sorties de prison, l’Erythréen aura en tout dû s’affranchir de près de 4 300 dollars.

La quatrième tentative sera la bonne. Après avoir payé 3 000 dollars à un passeur, Mehretab monte sur un canot. En revanche, ses amis sont toujours en Libye, et certains d’entre eux toujours en prison. "J’ai beaucoup d’amis là-bas", raconte-t-il. "Ce sont mes meilleurs amis, mes frères. Ils sont tous là-bas et je les ai laissés". (...)

Elizabeth n’a aucun moyen de gagner de l’argent, ni même de voir la lumière du jour.

La jeune femme va également faire l’expérience des prisons libyennes. Elle dit y avoir vu des personnes se faire tirer dessus et se faire torturer par les gardes. Elle a entendu les appels à l’aide restés vains d’une femme enceinte, décédée alors qu’elle tentait d’accoucher dans sa cellule à même le sol.

Après plusieurs années passées là, Elisabeth réussit à les convaincre de la laisser partir. Elle montera sur le même canot que Mehretab. (...)

Les Érythréens paient le prix fort

Médiateur culturel pour Emergency, Yohannes, qui travaille régulièrement avec des migrants ayant traversé la mer, explique que l’histoire d’Elisabeth n’est pas un cas isolé. Les passeurs autorisent régulièrement des femmes seules et sans argent à rejoindre des groupes de plusieurs dizaines d’hommes pour faire la traversée sans payer.

En revanche, ils font payer le prix fort à des migrants comme Mehretab, pour lesquels il est impossible de retourner dans leur pays d’origine. (...)