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le Monde Diplomatique
Vers une recherche sans brevets
Article mis en ligne le 30 octobre 2013
dernière modification le 27 octobre 2013

Face à la cupidité des laboratoires pharmaceutiques, un projet de traité international vise à découpler le coût de la recherche et le prix des médicaments, afin de faciliter la découverte de remèdes efficaces et accessibles aux populations qui en ont le plus besoin. Même lorsqu’elles ne sont pas solvables. Certains mécanismes permettent d’ores et déjà d’orienter la recherche vers les maladies endémiques au Sud.

L’industrie pharmaceutique ? « Un passé magnifique. Un présent stérile, fait de luxure, de mensonges et de corruption. Un futur basé sur l’espoir… » Avec le guide qu’ils ont publié et qui a fait grand bruit (1), les Prs Philippe Even et Bernard Debré jettent un pavé dans la mare : sur les quatre mille médicaments commercialisés en France, la moitié seraient inutiles, 20 % mal tolérés et 5 % potentiellement très dangereux. Bien sûr, « entre 1950 et 1990, il est certain que l’industrie pharmaceutique a mis sur le marché des médicaments qui ont changé nos vies : les antibiotiques, les anti-inflammatoires, les vaccins, les traitements contre le cancer, les maladies cardiaques ou le diabète ». Mais, à partir des années 1990, cette industrie s’est convertie au capitalisme spéculatif, à la recherche de profits immédiats, en visant des niveaux de rentabilité de l’ordre de 20 % par an, sans guère provoquer de réaction des pouvoirs publics.

Si, auparavant, elle obtenait des brevets mérités pour de véritables inventions, « Big Pharma », sous la pression de ses actionnaires, a dès lors consacré son énergie à créer de nouvelles pathologies et à inventer des brevets. Au prix, parfois, de la santé des patients qu’elle est censée protéger. (...)

Faute d’intervention politique, cette même logique a longtemps poussé les industriels à négliger les besoins des patients les plus démunis de la planète. Cependant, divers acteurs, Médecins sans frontières (MSF), quelques pays européens ou la Fondation Bill & Melinda Gates, ont décidé de relancer la recherche contre les maladies négligées dans le cadre de partenariats comme l’Initiative médicaments pour les maladies négligées (Drugs for Neglected Diseases Initiative, DNDi). Mais ces projets restent fragiles. Ils dépendent de l’aide au développement et des politiques de « responsabilité sociale » des groupes pharmaceutiques.
Création d’un fonds international

Réunie à Genève en mai 2012, l’Assemblée mondiale de la santé, organe décisionnel de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a adopté une résolution visant à changer ces règles du jeu, qui « prie le directeur général d’organiser une réunion des Etats membres à composition non limitée qui analysera en profondeur le rapport et la faisabilité des recommandations proposées par le groupe de travail consultatif d’experts (2) ». Ce rapport propose de redéfinir le financement et la coordination de la recherche et développement (R & D) pharmaceutique de façon à répondre aux besoins sanitaires des pays du Sud. Sa recommandation principale est la négociation d’une convention internationale, engageant tous les pays, pour promouvoir la R & D, que le marché seul ne suffit pas à stimuler. (...)

comme l’écrivait Martin Luther King dans sa Lettre de la geôle de Birmingham, « l’histoire est la longue et tragique illustration du fait que les groupes privilégiés cèdent rarement leurs privilèges sans y être contraints ».