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Une nouvelle offensive dans le monde de la viande industrielle : les multinationales du Sud
Article mis en ligne le 23 novembre 2010
dernière modification le 21 novembre 2010

Ce long dossier a été publié en octobre 2010 sur le site de la petite organisation internationale à but non lucratif GRAIN qui soutient la lutte des paysans et des mouvements sociaux pour renforcer le contrôle des communautés sur des systèmes alimentaires fondés sur la biodiversité.

De nos jours, les pays du Sud consomment apparemment de plus en plus de viande. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), la consommation de viande par habitant dans les pays en développement a doublé entre 1980 et 2005, et la consommation d’œufs y a été multipliée par trois. Comment expliquer cette évolution ? Pour certains, le facteur majeur a été l’augmentation des revenus en Asie, mais cela peut difficilement justifier une hausse aussi énorme. La raison principale est plutôt à chercher du côté de l’approvisionnement. Les entreprises de l’agrobusiness, soutenues pas de fortes subventions et par les gouvernements, ont réussi, au cours des dernières décennies, à pousser la production mondiale de viande à des niveaux inouïs, provoquant des conséquences dévastatrices pour les animaux, les personnes et l’environnement. Une grande partie de cette production industrielle se fait désormais dans les pays du Sud, où une nouvelle génération de compagnies transnationales (TNC), originaires de ces pays, s’allient avec les firmes plus anciennes des pays du Nord, pour imposer “le dieu viande” d’un bout à l’autre de la planète.(...)

Qu’est-ce qui alimente l’essor effréné du marché de la viande dans les pays en développement dans le Sud ? La réponse la plus évidente est l’abondance de viande bon marché provenant de fermes industrielles, elle-même rendue possible par l’abondance d’une alimentation animale bon marché. L’explosion actuelle de la consommation de viande n’est que la répétition de ce qui s’est passé il y a des années au Nord, quand les entreprises ont commencé à installer des fermes industrielles et des parc d’engraissement, pour transformer en protéines animales destinées à la restauration rapide et aux supermarchés les montagnes de céréales et d’oléagineux produites grâce aux subventions. On se débarrassait – et c’est toujours le cas - des excédents de viande, depuis les cuisses de poulet congelées aux tripes de bovins, dans les pays pauvres. (....)

Derrière le système de la viande industrielle, s’agite tout un monde de grandes entreprises impliquées dans la production et le commerce de la viande. C’est un système qui reçoit toutes sortes de subventions, aux États-Unis comme en Europe.(...)

Quelques grains de sable pour enrayer la machine

Heureusement, des mouvements de lutte se mettent en place pour défier l’expansion de la production de viande industrielle dans le Sud, qu’elle soit imposée de l’extérieur ou non. Des groupes thaïlandais ont fait alliance pour résister à CP et ont commencé à communiquer avec des groupes d’autres pays où est implanté CP. De même, les groupes brésiliens qui suivent et remettent en cause les investissements de la Banque de développement du Brésil dans les multinationales brésiliennes commencent à prendre contact avec les gens des pays d’Afrique où travaillent ces entreprises. Au niveau local, les communautés mexicaines affectées par les fermes porcines industrielles rejoignent les réseaux nationaux pour la justice sociale et environnementale afin de combiner leurs efforts de résistance.. Et au sein des principales multinationales de la viande des pays du Sud, les ouvriers lancent des ponts au-dessus des frontières par l’intermédiaire de leurs syndicats : c’est ce que font les ouvriers de Marfrig et de JBS avec leurs homologues en Uruguay, en Argentine et en Europe.

Ces efforts pour bâtir des alliances sont essentiels et il faut absolument les soutenir, s’en inspirer et aller plus loin. Il faut aussi examiner avec une plus grande attention tout cette avalanche d’accords entre les gouvernements du Sud. Enfin, il faut travailler davantage à forger des connexions et des liens de coopération entre les groupes qui s’opposent aux multinationales du Sud et les gens affectés par les stratégies d’expansion de ces dernières à l’étranger. Les enjeux sont cruciaux. Le système de la viande industrielle est beaucoup trop dangereux pour le laisser se développer dans le Sud sans réagir.