Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
blogs de Médiapart
Une étape de plus dans la criminalisation de l’asile en Grèce. Pétition
/Mathilde Weibel Lesbos
Article mis en ligne le 22 mars 2022

Le procès d’Amir Zahiri et d’Akif Rasuli, deux demandeurs d’asile afghans accusés d’avoir facilité l’entrée illégale de demandeurs d’asile sur le territoire grec, et d’avoir provoqué le naufrage de leur propre embarcation, a été repoussé au 7 avril prochain.

Les deux jeunes hommes sont arrivés en Grèce en mars 2020. Amir était accompagné de sa femme, alors enceinte, et de leur fille. A cette époque, en pleine pandémie, le gouvernement grec avait suspendu le droit de demander l’asile, considérant d’office toute personne entrant sur son territoire sans documents valables comme illégale, et contrevenant ainsi à la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne et à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés. Comme des centaines, des milliers d’autres, Amir Zahiri (25 ans) et Akif Rasuli (23 ans) avaient fui l’Afghanistan et cherchaient refuge en Europe. (...)

Pendant la traversée, les garde-côtes grecs ont cherché à les repousser vers la Turquie en utilisant des barres de métal, effectuant un « pushback » ou refoulement, comme ils le font de plus en plus souvent. Le bateau, percé, a commencé à prendre l’eau et a fini par chavirer, et les garde-côtes ont été forcés de recueillir les naufragés à bord. Les deux hommes ont été violemment battus devant le reste du groupe, y compris la femme d’Amir et leur fille. A peine arrivés sur la terre ferme, ils ont été séparés du groupe avec lequel ils avaient voyagé. Ils ont été accusés d’être des passeurs ayant provoqué le naufrage du bateau, et ils ont été placés en détention provisoire. Le 8 septembre 2020, ils ont été condamnés à 50 ans de prison chacun.

La femme d’Amir a accouché entre-temps, alors que son mari était détenu pour avoir tenté de sauver sa vie et celle de sa famille en rejoignant l’Europe. Il a rencontré son bébé une fois, après son procès, et a pu le tenir dans ses bras pendant quelques minutes, sous les injures d’un policier qui lui hurlait de rendre le nouveau-né à sa mère.

Le procès en appel devait se tenir aujourd’hui à Mytilène, sur l’île de Lesbos, mais il a été repoussé au 7 avril. Les deux jeunes hommes devront donc retourner en prison, en attendant la prochaine date de ce rendez-vous kafkaïen avec la justice européenne.

Dans la prison de Chios, où ils sont actuellement détenus, se trouve également Hand Abdi Mohammad, 28 ans, un demandeur d’asile somalien qui a été condamné à 142 ans de prison pour avoir pris le gouvernail du bateau sur lequel il tentait de rejoindre l’île de Lesbos, comme le lui ordonnait le passeur en le menaçant d’une arme. Les prisons sont pleines de ces hommes souvent choisis au hasard, à l’arrivée de chaque bateau, et accusés à tort d’en être les capitaines.

Un autre cas semble confirmer qu’il n’existe pas de limites au cynisme des autorités qui cherchent à tout prix à criminaliser le malheur. (...)

Hier, le photographe norvégien Knut Bry a été arrêté par la police à Lesbos alors qu’il photographiait le port de Mytilène, et en particulier un bateau des garde-côtes. L’artiste mondialement reconnu, qui collaborait depuis 2016 avec l’ONG Lesvos Solidarity, est accusé d’espionnage. (...)

Pour soutenir les « Deux de Samos », N. et Hasan, vous pouvez signer la pétition